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Mediapart
Dans les cortèges pro-Gaza : « La flottille a fait sauter les clivages »
#israel #palestine #Hamas #Cisjordanie #Gaza #FlotilledelaLiberte #Madleen
Article mis en ligne le 16 juin 2025
dernière modification le 15 juin 2025

Cinq jours après l’arrestation par les autorités israéliennes de l’équipage du bateau humanitaire, le mouvement de solidarité avec la Palestine a connu un regain de mobilisation, samedi 14 juin. Reportage auprès des manifestants, dans les cortèges de Paris, Rouen et Toulouse.

Des cortèges fournis à Paris, Toulouse (Haute-Garonne), Rennes (Ille-et-Vilaine), ou Rouen (Seine-Maritime). Cinq jours après l’arrestation dans les eaux internationales des douze membres de l’équipage du Madleen, le mouvement de solidarité avec le peuple palestinien a connu un pic de mobilisation, samedi 14 juin.

Tandis que trois membres de la flottille – dont deux Français – demeurent incarcérés dans des conditions opaques en Israël, l’action de désobéissance civile a signé un tournant, d’après de nombreux militant·es. « Ça a donné un coup d’énergie et diversifié les participants », se réjouit Catherine, 69 ans, habituée des rassemblements pro-Gaza, en arrivant sur la place de la République, point de départ de la manifestation parisienne.

Le cortège n’est pas encore formé, mais quelques milliers de personnes attendent déjà. Au milieu de la place, la statue est encore couverte de tags – « Free Gaza », « Free Palestine », « Free Madleen » –, vestiges des rassemblements qui ont émaillé la semaine de mobilisation, pour réclamer la libération des membres de la flottille. Jeudi 12 juin, c’est ici que l’eurodéputée La France insoumise (LFI) Rima Hassan (lire son entretien), tout juste expulsée d’Israël, a été accueillie sous les vivats. (...)

« Les manifestations pour Gaza de l’année dernière ne rassemblaient que des vieux militants historiques et des jeunes très politisés. Cette semaine, j’ai senti un changement, on a vu affluer des nouvelles personnes. Depuis le rassemblement du comité Adama [contre les violences policières en juin 2020 – ndlr], hormis pendant la réforme des retraites, je n’avais pas vu autant de monde sur la place de République », appuie Catherine, ancienne bibliothécaire syndiquée à la FSU, aujourd’hui militante de la Ligue des droits de l’homme (LDH).

La FSU, comme la CGT et Solidaires, sont engagées de longue date aux côtés des organisations propalestiniennes. Mais cette semaine, le front a été rallié par la CFDT et l’Unsa. Dans un communiqué commun, l’intersyndicale a dénoncé la « fuite en avant mortifère des autorités israéliennes et les exactions commises à Gaza », appelant à rejoindre le cortège parisien de samedi. « C’est le signe d’un élargissement et d’une réprobation totale des massacres en cours, la flottille a fait sauter les clivages », veut croire Catherine.

Un nouveau souffle (...)

Avant le départ de la marche, Rima Hassan a justement insisté sur la « diversité » des membres de l’opération, ainsi que sur l’antériorité de ce mode d’action. Depuis l’instauration d’un blocus sur la bande de Gaza, pas moins de 36 expéditions internationales – rassemblant des élu·es, des activistes, des artistes, etc. – ont tenté de venir en aide au territoire palestinien par les eaux, pour cinq succès seulement.

« Nous nous sommes mis en action à notre échelle, nous ne sommes pas des héros, mais nous souhaitions montrer qu’il était possible d’agir et d’essayer de dévier la trajectoire dans laquelle les gouvernements nous engouffrent », a lancé l’eurodéputée devant les manifestant·es. La veille, fustigeant l’attitude du gouvernement français, la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet avait profité du 130e anniversaire du syndicat pour saluer l’action des dockers de Fos-sur-Mer (Bouches-du-Rhône), qui ont refusé de charger des composants militaires en partance pour Israël.

Cet élan de solidarité a toutefois ses limites. « Où sont les médias français ? », a par exemple demandé au départ de la manifestation parisienne l’influenceur politique « Malek délégué ». Ce dernier a en effet rappelé la faiblesse de la mobilisation de la presse française pour protester contre l’incarcération, toujours en cours, du reporter de Blast Yanis Mhamdi – dont le statut de journaliste a même été occulté par plusieurs grandes rédactions occidentales. (...)

Dans les rangs de la manifestation toulousaine, les récents propos d’Emmanuel Macron arguant du « droit d’Israël à se défendre » pour justifier le déclenchement des offensives militaires sur Téhéran passent très mal. Lors de la prise de parole en fin de manifestation, le représentant de la LDH locale égrène en miroir les droits disparus du peuple palestinien : « Vivre en paix sur sa terre, se nourrir correctement, aller à l’école, le droit à l’eau potable, le droit d’aller à la plage... Le peuple palestinien, lui, n’a aucun de ces droits aujourd’hui, ils sont réduits en poussière. Macron n’a pas honte, il est la honte. Et ici, à Toulouse, avec une légèreté obscène, on se jumelle... »

L’allusion au jumelage liant Toulouse à Tel-Aviv depuis 1962 fait gronder la foule. À la tribune, le député LFI François Piquemal, candidat aux municipales de 2026, entouré de ses collègues insoumis Hadrien Clouet et Christophe Bex, demande la suspension de l’accord de jumelage et le renforcement de la coopération avec Ramallah, en Cisjordanie. (...)