
Diffusé ce soir (12 janvier) sur BFMTV, le documentaire de Michaëlle Gagnet retrace les agressions commises par le prêtre. Il donne la parole aux victimes et à Patrick Charles-Messance, un cinéaste qui avait tenté de produire un film à la mort de l’abbé, en 2007. Rencontre.
Xepuis la révélation, en juillet dernier, des premiers témoignages accusant l’icône d’Emmaüs de nombreuses agressions sexuelles, les enquêtes journalistiques se multiplient. Michaëlle Gagnet apporte sa pierre à l’édifice avec son très dense documentaire Abbé Pierre, 50 ans d’impunité, diffusé sur BFMTV. Outre les témoignages sidérants de victimes déjà lus dans la presse, son récit illustre ce que les archives révèlent petit à petit : beaucoup savaient. À Emmaüs, dans la hiérarchie catholique, et dans le cercle familial du prêtre. Un réalisateur, aussi, avait eu vent des violences dont était capable Henry Grouès. En 2007, alors que le religieux vient de mourir, Patrick Charles-Messance rencontre plusieurs femmes qui lui confient des agressions sexuelles, dont la modèle et artiste Sanda Slag, ancienne amie de l’abbé Pierre. Patrick Charles-Messance a transmis à Michaëlle Gagnet les deux cassettes de l’interview tournée en 2007, jamais rendue publique jusque-là malgré un projet de film proposé à de nombreuses chaînes de télévision. Il revient sur ce moment où le silence aurait pu être brisé.
En 2007, pourquoi décidez-vous d’enquêter sur l’abbé Pierre ?
C’est l’histoire de Jean-Christophe Ménétrier, cet homme qui a la conviction d’être le fils de l’abbé Pierre, qui m’a mis la puce à l’oreille. Il venait de publier son livre, très mal reçu par la critique. Son histoire, qu’elle soit vraie ou fausse, m’a donné envie de creuser. Je l’ai rencontré, il m’a fait écouter des enregistrements sonores de l’abbé, qui ne reconnaît à aucun moment être son géniteur. Mais j’étais troublé. Puis, je suis entré en contact avec la chanteuse et modèle Sanda Slag, grande amie de l’abbé dans les années 1980 et 1990. La sachant atteinte d’un cancer, je décide de filmer son interview, avec son accord. Elle me confie des faits extrêmement brutaux, (...)
Pourquoi ce film n’a-t-il pas vu le jour ?
Je n’ai pas trouvé de diffuseur. Je l’ai pourtant proposé à quasiment toutes les grandes chaînes françaises, publiques et privées, ainsi qu’à de plus petites chaînes. Malgré les relances, je n’ai pas eu beaucoup de retours. C’était soit le silence, ce qui est une forme de réponse, soit des refus. Les rares qui ont répondu m’ont expliqué que l’abbé Pierre était intouchable. (...)