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le Café Pédagogique
Contester Parcoursup. Sociologie d’une plainte
#parcoursup #selection #algorithmes #inegalites #enseignementsuperieur
Article mis en ligne le 30 avril 2024
dernière modification le 28 avril 2024

Parcoursup », du nom de sa plateforme est devenue la bête noire de générations de bachelières et bacheliers, comme de leurs familles. Il est le nom du système numérique algorithmique de sélection et d’orientation des élèves et étudiant·es qui a succédé à la plateforme APB. La réforme Parcoursup de 2018, en lien avec le bac Blanquer, apporte un changement radical dans la politique éducative en France : le baccalauréat n’est plus un sésame pour entrer à l’université mais conditionne désormais l’entrée dans l’enseignement supérieur. Cette réforme inaugure un cycle de réforme du système éducatif dans le secondaire comme dans le supérieur (sélection master) qui approfondit la sélection sociale et les inégalités du système dans un contexte de massification de l’enseignement supérieur.

Dans leur ouvrage « Contester Parcoursup », deux chercheuses décrivent les effets de Parcoursup, mais également de la sélection en master et de la réforme de l’accès aux études de santé, sur les familles et les usagers. A partir d’entretiens et d’une analyse des recours, elles étudient l’évolution de l’accès à l’Enseignement supérieur et la recherche. Annabelle Allouch, sociologue et Delphine Espagno Abadie, maitresse de conférences en droit public décrivent et analysent les conséquences – individuelles et sociales – de la réforme en termes de relation entre les élèves, leurs familles et l’institution scolaire, voire l’État. Quelques jours après la clôture des vœux sur Parcoursup pour les élèves et à l’occasion de la sortie de cet ouvrage au carrefour de deux champs de recherche, la sociologie et le droit, le Café pédagogique pose quelques questions à ses auteures pour comprendre ce qui se joue là. (...)

Delphine Espagno-Abadie : L’un des points de départ du livre consiste non pas à considérer les effets des réformes de l’accès dans l’enseignement supérieur en termes d’inégalités mais aussi en termes de sentiments d’injustices (...)

Annabelle Allouch : Ce que souligne l’enquête c’est que les plateformes ont changé l’organisation du rapport aux institutions : dans un contexte d’autonomie des établissements, de décentralisation, il revient de plus en plus à l’usager de réguler le système scolaire et ses éventuels dysfonctionnements, non plus à ce dernier d’assurer de manière égalitaire – ou équitable – les droits de l’usager. Or, cette posture est un leurre puisque la capacité à se défendre, c’est-à-dire à connaitre suffisamment les institutions pour se faire justice est socialement situé.

En cela, le livre complète les études en sociologie de l’éducation, notamment celles écrites autour de l’Observatoire de la Vie Étudiante et de la DEPP qui soulignent maintenant, et avec précision, l’existence de deux effets des plateformes : la polarisation des publics par établissement, c’est-à-dire la manière dont les publics les plus dotés scolairement – qui sont aussi souvent les plus favorisés socialement – ont de plus en plus tendance à se retrouver dans les établissements les plus dotés en capital symbolique et parfois en budget d’une part, et d’autre part les inégalités à l’égard des élèves issus en particulièrement des bacs technologiques et professionnels dont l’horizon est plus limité à certaines filières, notamment courtes, dans une perspective adéquationniste (...)

Contester Parcoursup, sociologie d’une plainte. Annabelle Allouch, Delphine Espagno-Abadie. Presses de Sciences po, avril 2024.