« Tout a été fait pour épargner Bernard Arnault et les milliardaires français. Il est donc demandé aux autres catégories sociales de faire des efforts. Une fois de plus », dénonce l’économiste Gabriel Zucman qui défend une taxe du même nom.
Le Premier ministre Sébastien Lecornu a présenté mardi 14 octobre le projet de loi de finances (PLF) pour 2026. Associations et économistes dénoncent des mesures injustes qui risquent d’augmenter la pauvreté en France, tout en actant des reculs écologiques.
Un budget injuste
A nouveau Premier ministre après sa démission, Sébastien Lecornu veut couper 17 milliards de dépenses et augmenter les recettes de 14 milliards d’euros. L’objectif : atteindre 30 milliards d’euros de réduction du déficit en un an, et ramener le déficit public à 4,7 % du produit intérieur brut (PIB).
L’examen du PLF a commencé ce lundi 20 octobre pour les députés de la commission des finances qui doivent décortiquer en trois jours la partie recettes du projet de loi de finances, avec 1 500 amendements à étudier.
Après l’échec de la censure du gouvernement minoritaire de Sébastien Lecornu, les groupes politiques souhaitent amender en profondeur ce projet de budget jugé insatisfaisant. Et pour cause, les mesures d’économies risquent d’aggraver la situation des personnes les plus précaires en France.
Parmi les nombreux efforts demandés aux Français, liste l’économiste Gabriel Zucman, les apprentis voient leur salaire net baisser de 20 %, pour atteindre 750 euros par mois. Les retraités leurs pensions gelées, soit une baisse de pouvoir d’achat de 1,6%. Les allocations familiales chutent de 1.000 euros par an pour les ménages modestes avec 2 adolescents.
Les APL sont rabotées. L’allocation adulte handicapée gelée, tout comme le RSA et les autres prestations sociales. Les franchises médicales – c’est-à-dire la partie des médicaments qui n’est pas remboursée – sont doublées. (...)
Rejetée par le premier ministre, cette taxe Zucman sera tout de même débattue grâce au dépôt de plusieurs amendements de la gauche. Elle devrait permettre de rapporter jusqu’à 25 milliards d’euros par an dans les caisses de l’Etat, en taxant seulement 2% du patrimoine des 1800 personnes les plus riches de France (possédant au moins 100 millions d’euros de patrimoine). Elle fait cependant face à une forte opposition, notamment par le Rassemblement national
Layla Abdelké Yakoub, responsable de Plaidoyer Justice fiscale et inégalités à Oxfam France, commente : « Sans surprise, avec ce budget 2026 qui a tout d’une cure d’austérité drastique, c’est encore les Français qui vont trinquer. Tous ? Pas vraiment… Une fois de plus ce budget protège largement les ultra-riches qui continueront d’échapper largement à l’impôt. »
Parmi les 19 mesures fiscales défendues par Oxfam, cinq permettraient de dégager à elles seules plus de 69 milliards de recettes (...)
Des signaux néfastes pour l’écologie
L’enveloppe allouée au ministère de la Transition écologique échappe au pire, puisqu’elle reste stable à un peu plus de 24 milliards d’euros. Parmi les bonnes nouvelles, le crédit d’impôt pour l’agriculture biologique est maintenu, un véritable soulagement pour les agriculteurs et agricultrices en difficulté. Cependant, des reculs notables sont dénoncés par les associations.
Le Fonds vert est ainsi divisé par deux, et chute à 600 millions d’euros.(...)
Après une diminution de 10 à 20% de leurs financements cette année, les programmes « nature » du ministère de la Transition écologique devraient perdre encore 8,5% de budget, soit 32 millions d’euros en moins en 2026. Or, ce financement sert aux parcs nationaux et réserves naturelles.
Niveau transports, aucune revalorisation des taxes sur les billets d’avion ou de suppression des niches fiscales du secteur n’apparaît dans le PLF 2026. (...)
Dans le domaine de l’énergie, les centrales photovoltaïques installées avant 2021 devraient être plus taxées.
Les débats s’annoncent âpres. Le vote sur la partie recettes du projet de loi de finances, et donc la taxation des plus hauts revenus, aura lieu le 4 novembre. Le gouvernement a promis de laisser le dernier mot au Parlement, en renonçant à l’article 49.3 de la Constitution.
Les élus disposent en tout de soixante-dix jours pour examiner le PLF à compter du dépôt du texte à l’Assemblée nationale le 14 octobre, soit jusqu’au 23 décembre, avec une promulgation avant le 31 décembre.
Le budget doit être adopté par le Parlement au 31 décembre. Passé ce délai, le gouvernement peut imposer le budget par ordonnance.