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Mediapart
Barnier revient un peu sur le dogme fiscal macroniste, mais promet surtout l’austérité
#Etat #budget #finances #democratie #Macron #Barnier
Article mis en ligne le 3 octobre 2024
dernière modification le 2 octobre 2024

Le premier ministre a acté une rupture avec le refus du camp présidentiel des hausses d’impôts pour les plus riches. Cela étant dit, il promet de faire peser les deux tiers de l’effort budgétaire sur la dépense publique. En somme, de poursuivre l’austérité engagée.

C’était une sorte de totem budgétaire un peu ridicule que la Macronie brandissait sans arrêt : ne jamais augmenter les impôts des grandes entreprises et des plus aisés, au nom de la compétitivité et de la pérennité de l’économie française. Ce, alors que plusieurs études économiques successives ont montré que les réformes de la fiscalité du capital menées depuis 2018 n’avaient pas ruisselé comme promis sur l’emploi et l’investissement.

Il devenait d’autant plus compliqué de tenir cette ligne que le déficit public a explosé (...)

Un trou budgétaire en grande partie dû... au manque de recettes fiscales ! (...)

Par le truchement de la recomposition parlementaire, qui a vu les macronistes perdre leur majorité relative, et la nomination d’un nouveau premier ministre de droite Michel Barnier, ce dogme est en partie tombé.

Lors de sa déclaration de politique générale prononcée mardi 1er octobre à l’Assemblée nationale, Michel Barnier a annoncé qu’il serait demandé « une participation au redressement collectif aux grandes entreprises qui réalisent des profits importants » et « une contribution exceptionnelle aux Français les plus fortunés afin d’éviter les stratégies de défiscalisation des plus gros contribuables ». (...)

Mais ne nous y trompons pas : le gros de l’effort viendra de la baisse des dépenses publiques. Le « premier remède » sera « la réduction des dépenses », a précisé le premier ministre, qui s’inscrit de ce point de vue dans la droite ligne du précédent gouvernement. (...)

« Le deuxième remède, c’est l’efficacité de la dépense publique », a-t-il aussi dit dans la même veine. « Trop souvent nos concitoyens ont l’impression de pas en avoir pour leurs impôts. Nous ferons la chasse aux doublons, aux inefficacités, aux fraudes, aux abus du système et aux rentes injustifiées. »

Dans le fameux tiré à part budgétaire envoyé aux parlementaires le 19 septembre, 10 milliards d’euros de baisses de dépenses publiques étaient déjà actés par Matignon. Pour atteindre ses objectifs, le nouveau gouvernement devra donc aller en chercher le double, si l’on suit sa logique. Ce, dans un timing extrêmement serré : les débats budgétaires débuteront le 21 octobre à l’Assemblée, et le vote de la première partie du projet de loi de finances 2025 est prévu autour du 29 octobre...

La Macronie veille au grain

Le premier ministre a donné peu de pistes sur les économies prévues lors de son discours. (...)

Le levier fiscal ne sera en fait que « le troisième remède » prôné par le premier ministre pour réduire le déficit en 2025. Et il y a fort à parier que les ministres macronistes veilleront au grain pour ne pas trop remettre en cause les intérêts des plus aisés. (...)

Il y a par ailleurs plusieurs sujets économiques importants sur lesquels Michel Barnier reprend le flambeau de son prédécesseur Gabriel Attal. Sur le pouvoir d’achat, notamment : ne voulant pas brusquer le monde économique, il n’a pas accentué la revalorisation du Smic, qui est prévue à 2 %, mais l’a juste avancée « dès le 1er novembre, en anticipation de la date du 1er janvier ».

« En outre, il est désormais démontré que notre dispositif d’allègement de charges freine la hausse des salaires au-dessus du Smic : nous le reverrons », a promis Michel Barnier. Un travail lancé par l’ancien premier ministre Gabriel Attal.

De même, selon une logique néolibérale bien connue qui consiste à trouver tous les moyens possibles pour faire gagner du pouvoir d’achat aux travailleurs et travailleuses sans augmenter les salaires, Michel Barnier propose de relancer la participation, l’intéressement et l’actionnariat salarié, et pas seulement dans les grandes entreprises. Une proposition qui ne gênera personne à l’Élysée.
Quelques divergences

Enfin, notons certains changements de cap. Le premier concerne les partenaires sociaux, littéralement ignorés depuis sept ans et qui sont, selon le nouveau premier ministre, « les mieux placés pour apporter des solutions ». Michel Barnier propose ainsi que des négociations s’ouvrent, « dès les prochaines semaines », « sur notre système d’indemnisation du chômage » ainsi que sur « l’emploi des seniors ». Il semble alors acter le renoncement à la nouvelle, et brutale, réforme de l’assurance-chômage promue par son prédécesseur, contre laquelle l’ensemble des syndicats s’étaient élevés. En remettant sur l’ouvrage le chantier de l’emploi des seniors, il envoie un autre signal positif, en particulier à la CFDT, qui le demande avec constance depuis des mois.

Pareillement, au sujet de la très décriée réforme des retraites de 2023, le nouveau premier ministre s’est montré ouvert à « proposer aux partenaires sociaux de réfléchir à des aménagements, raisonnables et justes ». Ce pour corriger « certaines limites [...]. Les questions des retraites progressives, de l’usure professionnelle, de l’égalité entre les femmes et les hommes face à la retraite méritent mieux que des fins de non-recevoir ». Mais sans surprise, il ne compte surtout pas bouger sur « l’équilibre » financier du système, c’est-à-dire revenir sur l’âge de départ à 64 ans.

Autre évolution, sur le logement, Michel Barnier s’est dit « favorable à l’extension du prêt à taux zéro », et ce « sur tout le territoire ». Une logique inverse à la politique menée depuis 2017, qui cible géographiquement les soutiens à l’achat immobilier.

Enfin, le nouveau premier ministre s’est permis une petite pique sur le recours, selon lui trop systématique, de l’exécutif macroniste aux cabinets de conseil privés. (...)

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