Avec plus de 140 élus, le parti d’extrême droite reste très loin de la majorité absolue qu’il visait, mais représentera, plus que jamais, une force centrale de l’Assemblée nationale.
Reboucher une bouteille de champagne est une activité périlleuse, rarement couronnée de succès. Au quartier général du Rassemblement national (RN), où s’étaient réunis les militant·es et les cadres dimanche soir, c’est pourtant ce qu’il aurait fallu faire tant l’ambiance a rapidement tourné au morose. Non seulement le parti d’extrême droite n’a pas obtenu la majorité absolue à l’Assemblée nationale, mais il a réalisé un score très en deçà de ses ambitions initiales : plus de 140 sièges, ce qui le place en troisième force politique dans l’hémicycle, derrière le Nouveau Front populaire (NFP) et la majorité présidentielle. (...)
L’échec du « plan Matignon »
La campagne d’entre-deux-tours du RN a été minée par les révélations sur les dizaines de candidat·es ayant tenus des propos racistes, sexistes ou homophobes, que la morgue de Jordan Bardella – qui a parlé de quelques « brebis galeuses » ou s’est caché derrière la soudaineté de la dissolution – n’a pas suffi à placer sous l’éteignoir. Depuis plus d’un an, le parti d’extrême droite répétait pourtant à l’envi qu’il était « prêt » pour une éventuelle dissolution.
Mais ces derniers jours, changement de ton : le discours des cadres du RN aura surtout consisté à se plaindre des multiples désistements de candidat·es de gauche ou de la majorité pour lui faire barrage. Des propos rappelant les complaintes de Marine Le Pen contre « l’UMPS » au début des années 2010, que Jordan Bardella a repris à son compte lors de sa prise de parole, dimanche soir. (...)
Marine Le Pen, elle, est restée silencieuse. La triple candidate à l’élection présidentielle a un temps envisagé de prendre la parole en duplex, un projet rapidement annulé une fois les résultats connus. (...)
Alors que le RN avait fait élire trente-huit député·es dès le premier tour, plusieurs sortant·es perdent leur siège à l’issue du second. (...)
Plus d’une vingtaine de députés épinglés par Mediapart pour leurs propos racistes, antisémites ou homophobes font leur retour, ou leur entrée, au Palais-Bourbon (...)
Le RN n’a certes pas réussi à enjamber le mur du front républicain, mais il se renforce encore dans ses bastions, en envoyant à l’Assemblée plus de 140 élu·es – contre 88 jusque là. Le parti d’extrême droite devrait représenter le groupe le plus important du futur hémicycle. Avec 30 eurodéputé·es à Bruxelles, une nouvelle manne financière issue de son excellent score au premier tour, il pourra aborder 2027 depuis une position plus que jamais incontournable dans la vie politique française.