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Au Festival du film de Locarno, ce sont aussi des hommes qui dénoncent la violence masculine
#femmes #MeToo #cinema
Article mis en ligne le 13 août 2024
dernière modification le 12 août 2024

Projetés à Locarno, le film “Drowning Dry” pointe la culture du virilisme tandis que le documentaire “La Déposition” témoigne des violences sexuelles dans l’Église. Deux œuvres fortes qui concourent à faire progresser la société.

Le cinéma ne cesse d’évoluer dans le sillage du mouvement #MeToo. Au festival de Locarno – jusqu’au 17 août –, deux films ont déjà montré comment ce profond changement redessine fiction comme documentaire, en faisant surgir des regards nouveaux sur la violence. (...)

Autour d’un drame qui se joue sous nos yeux mais dont l’issue se déplace tout au long du film, le scénario construit avec intelligence un discours offensif sur la sensibilité piétinée par une domination masculine à la fois ordinaire, envahissante et dangereuse. Derrière la caméra, un homme trentenaire observe ses congénères et règle ses comptes avec un certain atavisme comportemental, une culture de la brutalité à laquelle il oppose la possibilité de prendre soin des autres, sans cesser d’être un homme. (...)

Drowning Dry est un exercice de rigueur qui en appelle à nos émotions mais surtout à notre réflexion, en gardant un sang-froid clairvoyant, parfois un peu glaçant. (...)

Tabous et aveuglements

D’hommes qui s’affrontent, il est aussi vivement question dans l’impressionnant documentaire de Claudia Marschal, La Déposition, présenté à la Semaine de la critique du festival suisse. Emmanuel Siess y expose comment, en 1993, à l’âge de 13 ans, il fut agressé sexuellement par le prêtre de son petit village, dans le sud de l’Alsace. C’est l’histoire de sa parole qui nous est racontée, comment elle fut ignorée, condamnée au silence, enfouie puis exhumée par un changement dans l’époque et les mentalités, par la culpabilité d’un père très croyant auquel le prêtre avait trop facilement vendu un récit l’innocentant, et surtout par la volonté d’Emmanuel Siess lui-même. (...)

Avec des photos qui font revivre le passé entourant un jour de 1993 figé dans la douleur, La Déposition prend la mesure d’un bouleversement intime et de ses retentissements collectifs. En disant où en est désormais l’enfant qu’était Emmanuel Siess, ce documentaire dit aussi où en est la société, aujourd’hui, face aux traumatismes comme celui qu’il a subi. Près de trente ans après les faits, et après bien des épreuves subies pour essayer d’oublier ou de ne pas oublier, un chemin est possible vers l’affirmation de soi-même. S’attaquer à la violence permet d’ouvrir les yeux. Cinématographiquement parlant aussi, c’est important.