Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
Mediapart
Animateur condamné pour viols : la ville d’Outreau attaquée devant le Conseil d’État pour avoir négligé une alerte
#enfants #viols #agressionsSexuelles #Outreau
Article mis en ligne le 9 décembre 2025
dernière modification le 7 décembre 2025

D’après nos informations, le Conseil d’État va examiner une requête visant à faire reconnaître la responsabilité de la mairie d’Outreau dans une affaire jugée aux assises en 2021. Informée dès 2016 de l’attitude inappropriée d’un agent avec un enfant, la ville se voit reprocher de n’avoir pas agi.

Deux décennies après « l’affaire d’Outreau », le nom de la ville va résonner à nouveau dans un dossier lié à la pédocriminalité, jusqu’au Conseil d’État cette fois. D’après nos informations, le juge administratif suprême devrait examiner, dans les prochaines semaines, une requête déposée par l’association La Voix de l’enfant, qui tente de faire condamner la municipalité du Pas-de-Calais pour des « fautes » et des « négligences » qui auraient été commises lorsque la mairie, en 2016, a été alertée du comportement inquiétant d’un animateur de maternelle. À l’époque, elle l’avait juste déplacé, sans enquête interne ni la moindre sanction.

Il se trouve qu’en 2021, cet animateur, Rudy Goudalle, a été condamné à vingt ans de réclusion pour des viols et agressions sexuelles sur treize enfants, âgé·es de 3 à 6 ans – il a reconnu une partie des faits, notamment ceux qu’il avait filmés.

Mais dès 2016, il avait inquiété l’une des Atsem, ces agentes chargées d’aider les enseignant·es de maternelle, en poste dans son école. Un jour de janvier, Jocelyne* a découvert l’animateur enfermé dans un local avec un petit garçon de 4 ans, la porte verrouillée de l’intérieur. Après l’avoir sermonné, elle a signalé l’incident à sa référente.

Quelques jours après, voulant en avoir le cœur net, Jocelyne est retournée toquer à la porte, retrouvant l’animateur claquemuré avec le même enfant – qui sera reconnu victime à l’issue du procès. Jocelyne a aussitôt informé la directrice, qui a fait remonter à la mairie, chargée du temps périscolaire et employeuse des deux agent·es.

Aucune enquête interne

C’est sur procès-verbal que l’Atsem a raconté la suite, durant l’enquête pénale : « J’ai été convoquée devant la maire […], qui n’a pas arrêté de me réprimander […] : […] il fallait faire attention à ce que je disais, à la diffamation, par rapport à “l’affaire d’Outreau” […]. Elle m’a dit que peut-être il ne se passait rien. Je lui ai répondu que même s’il ne s’y passait rien, moi, avec des “si”, je n’arrivais pas à dormir. »

Comme la cohabitation entre Jocelyne et l’animateur était devenue impossible, ce dernier a été basculé ailleurs. Et son contrat a même été renouvelé un peu plus tard.

Aujourd’hui encore, la municipalité socialiste, dirigée par Sébastien Chochois depuis 2018, conteste avoir commis la moindre faute. En première instance, en novembre 2024, le tribunal administratif de Lille a débouté La Voix de l’enfant : sans même aller sur le fond, les magistrats ont estimé que l’association n’avait aucun intérêt à agir. Et l’ont condamnée à verser 1 000 euros à la ville d’Outreau.

Mais La Voix de l’enfant ne veut rien lâcher, surtout à l’heure où les mises en cause d’animateurs se multiplient en France (voir nos révélations), pour des suspicions de violences sexuelles commises sur ces temps de cantine, d’après-classe ou de vacances qui échappent à l’Éducation nationale, et où les enfants sont pris·es en charge par des adultes aux formations souvent minimalistes, sinon inexistantes. Dans bien des cas, en plus, les systèmes de détection et de signalement se révèlent défaillants.

L’association a donc fait appel devant le Conseil d’État.Mais La Voix de l’enfant ne veut rien lâcher, surtout à l’heure où les mises en cause d’animateurs se multiplient en France (voir nos révélations), pour des suspicions de violences sexuelles commises sur ces temps de cantine, d’après-classe ou de vacances qui échappent à l’Éducation nationale, et où les enfants sont pris·es en charge par des adultes aux formations souvent minimalistes, sinon inexistantes. Dans bien des cas, en plus, les systèmes de détection et de signalement se révèlent défaillants.

L’association a donc fait appel devant le Conseil d’État. (...)