
L’État est reconnu coupable des blessures infligées à Geneviève Legay. La septuagénaire avait été victime de blessures graves lors d’une violente charge policière en mars 2019, dans une manifestation des Gilets jaunes à Nice. La disproportion de l’action des forces de l’ordre (contre des personnes ne présentant aucune menace) et les dénégations obstinées du pouvoir ont fait de l’affaire Legay l’emblème des violences policières. Blast publie le jugement du tribunal administratif de Nice.
À 78 ans, Geneviève Legay enchaîne les victoires contre les violences policières. Ce mercredi 15 mai, la 4e chambre du tribunal administratif de Nice a reconnu l’État responsable de ses blessures, subies à Nice il y a cinq ans.
Ce jour-là, le samedi 23 mars 2019, la Gilet jaune, porte-parole départementale d’Attac, manifestait pacifiquement place Garibaldi malgré une interdiction préfectorale. Pour disperser la foule, le commissaire divisionnaire Rabah Souchi avait déclenché une charge qualifiée « [d’]instantanée, brutale et violente » par le capitaine de gendarmerie H., témoin directe de la scène. La septuagénaire avait été heurtée par un policier. Tombée au sol, inanimée, elle avait été immédiatement hospitalisée pour un grave traumatisme crânien et cinq côtes fracturées.
Conséquences de ces blessures, Geneviève Legay avait dû rester deux longs mois à l’hôpital. Elle en supporte toujours de graves séquelles - perte d’odorat et d’ouïe et goût perturbé. (...) (...)
La semaine dernière, le juge administratif est donc venu enfoncer le clou malgré les tentatives de l’État pour étouffer l’affaire, ou tout au moins retarder son intervention. Le ministère de l’Intérieur et le préfet des Alpes-Maritimes avaient demandé à ce que cette requête ne soit pas jugée avant la fin de la procédure judiciaire entamée contre le commissaire Souchi. Une façon de repousser aux calendes grecques une possible condamnation de l’État. En vain.
S’appuyant sur le réquisitoire définitif du procureur de la République devant le tribunal judiciaire de Lyon, l’arrêt du tribunal administratif de Nice établit clairement les faits. Sans ambiguïté, mettant rétrospectivement à mal les dénégations et les contrefeux que le pouvoir avait ouverts, il constate que « les blessures de la requérante résultent directement d’une mesure prise par l’autorité publique ». « Dès lors », logiquement, le juge en conclut que « la responsabilité de l’État doit être engagée ». (...)
Le juge administratif a souhaité bien préciser les choses, histoire de clore le débat. Si l’arrêt note que Geneviève Legay « a fait preuve d’une imprudence délibérée », en participant à un rassemblement frappé d’une interdiction préfectorale, il souligne néanmoins que « le danger auquel elle s’est exposée ne pouvait raisonnablement inclure celui de risquer d’être sérieusement blessée à la tête ». Surtout que son comportement (pas plus que celui des personnes qui l’accompagnaient) ne justifiait pas plus une telle violence. (...)
Une expertise doit maintenant être menée pour chiffrer le montant des réparations à verser à la victime. Dans son recours déposé en novembre 2020, Geneviève Legay réclamait 50 000 euros à l’État.