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« VIVEZ À VOS RISQUES ET PÉRILS, MAIS VIVEZ DOCILES ET PRÉVISIBLES »
Le grand détournement néolibéral de Foucault. Entretien avec Valérie Marange Par Bruno Thomé et Nathalia Kloos
Article mis en ligne le 14 mars 2018

(...) Retour sur l’individualisation de la responsabilité et le gouvernement par la peur que véhicule l’idéologie néolibérale du risque.

« Et l’on disserte sur l’attitude des Français face au risque, leur frilosité, la vaine exigence du risque zéro. Car le risque est manifestement aussi au centre de la morale moderne. D’un côté, certains dénoncent la démoralisation d’un peuple de rentiers (de l’État-providence), souhaitent que l’on donne à nouveau avantage au risque sur la rente, vantent l’esprit d’entreprise et voient, finalement, dans la plus grande capacité, individuelle et collective, à prendre des risques un progrès de la civilisation. De l’autre côté, on dénonce l’ultralibéralisme de ceux qui voudraient nous replonger dans le risque, remettre en risque les individus alors qu’on était précisément parvenu à les en protéger. Comme si la tendance progressiste se mesurait sur le seul vecteur de la sécurité, comme si la prise de risques était par elle-même foncièrement dangereuse. […] Parler de risque renvoie à une morale de l’action plus que de l’abstention. C’est en ce sens qu’on oppose risque et rente. Autour du risque se divisent deux grandes formes d’existence : ceux qui acceptent le risque, le revendiquent, assument leur condition d’animal voué au risque et ceux qui le refusent, l’évitent, cherchent à s’en protéger – les courageux et les frileux. Notre culture a plutôt célébré les premiers que les seconds : le chasseur, le guerrier, l’aventurier, l’entrepreneur, l’inventeur, le chercheur, le pionnier, l’investisseur, l’homme politique, plutôt que le rentier, le fonctionnaire. »

Denis Kessler et François Ewald,
« Les noces du risque et de la politique »,
Le Débat, no 109, avril 2000

(...)