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Tout comprendre de la guerre entre semences contrôlées et paysannes
Semences paysannes, plantes de demain, de Robert Ali Brac de la Perrière ; Préface d’Antonio Onorati, Ed. Charles Léopold Mayer, 226 pages, 20 euros.
Article mis en ligne le 8 février 2015
dernière modification le 5 février 2015

Dans Semences paysannes, plantes de demain, Robert Ali Brac de la Perrière pose de manière claire et solide les problématiques liées aux semences et à la mainmise d’une poignée de semenciers sur un marché mondialisé. Et raconte les combats engagés et la résistance. La bible des semenciers paysans.

Les grandes firmes semencières internationales n’ont pas bonne presse. Monsanto, Pioneer, Syngenta, Limagrain… Autant de noms qui évoquent confusément des groupes qui n’ont pour objectif que de ligoter le monde agricole en lui imposant - au nom bien entendu du progrès de l’humanité -, des semences sélectionnées par eux, produites par eux, et commercialisées par eux.

Mais quelle est la réalité de cette image ? Comment une poignée de semenciers a-t-elle pu prendre le contrôle d’un marché mondialisé ? Pourquoi l’impuissance des Etats et les institutions internationales spécialisées – telle la FAO ? Des îlots de résistance existent-ils ? De quel poids pèsent-ils ?

La bible des semenciers paysans

C’est à toutes ces questions que répond Robert Ali Brac de la Perrière dans son ouvrage. Il le fait en militant – l’aventure du Réseau semences paysannes, d’Inf’OGM, de l’ONG Grain, c’est aussi la sienne – mais surtout en spécialiste des ressources génétiques, maîtrisant sur le bout des doigts les multiples aspects d’un dossier qui mêle la génétique et le droit, les institutions internationales et les expériences locales - sur fond de gros sous.

Tout y est. Comme le dit dans la préface, Antonio Onorati, le président de Crocevia, l’une des plus anciennes associations italiennes de coopération internationale, Robert Ali Brac de la Perrière « pose de manière claire les problématiques liées aux semences, aux droits de propriété, à l’innovation, au génie génétique ou à la transition vers l’agroécologie ».

Son livre c’est un peu la Bible des semenciers paysans. (...)

Des centaines de variétés anciennes ont été éliminées au profit de « variétés élites » incontestablement plus productives mais fragiles et inséparables d’un environnement agricole spécifique qui fait la part belle aux engrais chimiques, aux traitements biocides et à l’irrigation.

L’apparition des « hybrides » - dits F1 - s’inscrit dans cette histoire. Ils ont pour caractéristique d’être d’une homogénéité remarquable. Leurs caractères sont uniformes. En revanche, à la génération suivante (F2) cette homogénéité est condamnée à disparaitre du point de vue génétique et il faut pour la retrouver revenir à la souche parentale. Ce qui en clair signifie que l’agriculteur qui serait tenté de récupérer des semences de l’année ne peut pas, sauf à voir dégringoler son rendement. Il est contraint de se tourner vers son marchand de semences, dont il devient un client captif.

L’hybridation : technique d’expropriation

Mise en œuvre il y a près d’un siècle l’hybridation domine le monde de la sélection des plantes. Au catalogue ne figurent plus, par exemple, que des maïs hybrides. Les autres ont été éliminés. Leur commercialisation est interdite. (...)

l’auteur ne se contente pas d’instruire le procès des semenciers. Dans des pages plus réjouissantes, il raconte les combats engagés et les batailles gagnées par ceux qui ne se résignent pas à l’appauvrissement du patrimoine végétal.

Qu’il s’agisse de ressusciter des variétés de céréales anciennes, d’assouplir les règles de commercialisation pour des légumes oubliés, d’obtenir que les paysans puissent échanger leurs semences comme naguère, une forme de résistante se développe sur tous les continents, dans les enceintes internationales aussi bien que dans des communautés villageoises.

Aujourd’hui enfermées dans des banques semencières aussi cadenassées que des coffres-forts les variétés anciennes seront peut-être libérées un jour.