
Nous avions déjà rendu compte du travail effectué par l’AVFT dans ce dossier, qui avait réuni de nombreux éléments de faisceau d’indices, là où la police s’était abstenue de mener une enquête sérieuse, ce qui avait permis la condamnation de l’employeur par le Conseil de prud’hommes, cinq ans plus tard, en septembre 2014, tandis que la plainte pénale était donc, sans surprise, classée sans suite.
Nous vous informions également que nous avions de nouveau entendu parler de cette entreprise, pour des violences commises par le gérant… trois mois après la condamnation de sa société aux prud’hommes.
Mme Bou… saisissait en effet l’AVFT en janvier 2015 et témoignait de violences commises par le gérant le mois précédent.
Celle-ci était engagée le 8 décembre 2014 en qualité de secrétaire comptable intérimaire dans la société NG Pro Multiservices. Dès les premiers jours, le gérant lui faisait subir des propos à connotation sexuelle, tels que « tu as de belles fesses » ou « tu es trop bonne », auxquels se sont ajoutés, à partir du 26 décembre, des agressions sexuelles.
. Mme Bou… appelle son employeur le 2 janvier 2015, pour l’informer qu’elle ne viendrait plus travailler. Il la suppliera de rester en promettant de cesser les violences, mais n’attendra pas longtemps avant de rompre son engagement, en commettant un viol à son encontre, le 6 janvier, par pénétration vaginale avec un doigt, frottant son sexe contre ses fesses, jusqu’à ce que Mme Bou… réussisse à se dégager et à alerter aussitôt son agence d’intérim.
Plusieurs victimes, une même stratégie
Ces deux victimes – l’AVFT en a identifié une troisième, qui n’a pas agi en justice mais a témoigné dans les procédures – ont eu recours aux mêmes stratagèmes pour tenter de se défaire du harcèlement sexuel et des agressions de M. M ; Elles ont toutes deux évité la proximité physique avec lui, tenté de ne pas se retrouver seules avec lui, et manifesté clairement leur refus, espérant que l’agresseur arrêterait, découragé.
A contrario, il est intéressant de remarquer les stratégies établies par M. M pour agir en toute impunité ; M. M s’en est pris à des femmes vulnérabilisées, que ce soit par une situation administrative difficile, par leur situation familiale, ou par la précarité qu’elles partageaient. (...)
Une procédure pénale longue et une déqualification
Mme Bou… dénonce alors les violences à l’agence intérim qui l’emploie, et à la fille de l’employeur, qui travaille aussi à NG Pro Multiservices. Celle-ci tente de la convaincre de ne pas porter plainte et lui propose un arrangement à l’amiable, refusé par la victime. Une proposition qui semble habituelle à la société, ayant proposé 3 000 euros à Mme Be… pour qu’elle retire sa plainte, quelques années auparavant.
Mme Bou… tente plusieurs fois de porter plainte et est éconduite par la police. Elle réussit finalement à porter plainte le 21 janvier 2015. Elle contacte l’inspection du travail le 23 janvier, et saisit l’AVFT peu de temps après sur ses conseils. Nous l’orientons vers Me Marjolaine Vignola pour la procédure pénale.
La longueur de ces procédures est éprouvante pour Mme Bou… qui a recroisé plusieurs fois M.M… depuis le dépôt de plainte. Elle nous confie encore sa peur, sept ans après les faits (...)
Le viol sera déqualifié en agression sexuelle(1). M.M est jugé devant le Tribunal Correctionnel de Pontoise – l’AVFT était partie civile dans la procédure – qui le condamnera le 26 juin 2020 à trois années d’emprisonnement dont deux de sursis, ainsi qu’à verser une provision de 3 000€ à Mme Bou….Le 15 décembre, M.M est condamné à verser 45 706 euros de dommages et intérêts à Mme Bou… , en reconnaissance des souffrances endurées, des frais de santé futurs, du préjudice sexuel et autres préjudices. C’est très sensiblement moins que le chiffrage des préjudices faits par Mme Bou…, qui n’exclut donc pas de faire appel.
Condamnation exemplaire de l’entreprise à indemniser l’AVFT
Parallèlement, Mme Bou…, assistée par Me Jasmine Malou, avait saisi le Conseil de Prud’hommes de Paris en juillet 2016, qui rendra son jugement le 19 janvier 2021, soit après la décision du Tribunal correctionnel. (...)