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Non-Fiction
Se trouver, s’organiser… s’aimer
Article mis en ligne le 31 août 2017
dernière modification le 29 août 2017

Dix ans après L’insurrection qui vient, trois ans après A nos amis, les éditions de La Fabrique ont fait paraître fin avril un nouvel opus du Comité invisible.

Le premier établissait un sombre diagnostic de la société capitaliste et particulièrement de la société française, tout en montrant pour chacun des thèmes qu’il passait en revue (individualisme hors sol, crise des institutions, crise du travail, déshumanisation de l’habitat, crise économique, crise environnementale et enfin crise de l’Etat-nation) comment ceux-ci pouvaient nourrir une possible rébellion – le livre se référait à la crise des banlieues de 2005. Cela pour autant que les révoltés sachent se trouver (s’attacher à ce que l’on éprouve comme vrai, se constituer en communes mais aussi abolir les assemblées générales) et s’organiser (pour ne plus devoir travailler, piller, cultiver, fabriquer, former et se former, connecter entre eux des territoires, voyager, renverser, de proche en proche, tous les obstacles, saboter les réseaux d’infrastructure, fuir la visibilité, etc.).

Le deuxième ouvrage (publié simultanément en huit langues et sur quatre continents), beaucoup plus long et certainement moins percutant, visait à tirer les leçons des soulèvements qui étaient intervenus dans l’intervalle dans de nombreux pays, mais qui n’avaient nulle part débouché sur une révolution. Pour expliquer à nouveau de quoi il ne fallait rien attendre (de la crise, de la politique, en menant une analyse des transformations du pouvoir, des nouvelles technologies, de la gauche pacifiste ou radicale, etc.). Et à quoi il convenait de s’attacher au contraire si l’on voulait œuvrer en faveur de celle-ci. Soit essentiellement au développement de communautés prenant en charge leur vie matérielle et morale et n’hésitant pas à recourir à la violence au besoin contre un ordre social conçu pour l’empêcher, en cherchant à se doter pour cela notamment des connaissances techniques nécessaires.

Le troisième a déjà fait l’objet de plusieurs recensions dans la presse et trône actuellement à côté des caisses dans nombre de bonnes librairies (l’effet de l’affaire Tarnac, qui avait attiré l’attention sur le premier en 2009, n’est ainsi pas près de s’épuiser, semble-t-il). Plusieurs d’entre elles y voient curieusement un assagissement par rapport aux précédents, alors même que ce nouvel ouvrage puise son inspiration dans les actions les plus violentes, du côté des manifestants, auxquelles ont donné lieu les manifestations contre la loi travail au printemps 2016, et que la justification de la violence y reste très présente. Il se pourrait que ce soit le fait d’une confusion avec la place plus importante que prennent dans celui-ci les questions existentielles. Il s’en est encore trouvé fatalement, à gauche, pour lui reprocher son abandon de la lutte des classes et de la grève générale, mais, là aussi, c’était déjà le cas des précédents. Il est vrai que celui-ci continue de dégommer à peu près tout ce que la gauche radicale compte en France de porte-paroles, ce qui réduit forcément le nombre de ses « amis » !

Comme pour les précédents, ses auteurs pensent à toute allure, ne s’embarrassent guère de démonstration, et il n’est pas simple d’en rendre compte. Ses différents chapitres sont introduits par la reproduction photographique de slogans apposés sur les murs par les manifestants du printemps 2016. L’ouvrage plaide pour le monde vécu et la vie, et donc en faveur d’une action politique qui s’inscrit résolument dans l’instant présent – d’où son titre –, face à un fonctionnement de la société qui prend partout, de plus en plus, la forme d’un naufrage. (...)