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Observatoire des inégalités
Refonder l’école devrait être une priorité pour faire réussir les plus pauvres
Article mis en ligne le 1er juillet 2015
dernière modification le 27 juin 2015

Si refonder l’école, c’est corriger les inégalités au sein du système éducatif, alors refonder l’école, c’est faire réussir les plus pauvres. Le point de vue de Jean-Paul Delahaye, Inspecteur général de l’éducation nationale et auteur du rapport « Grande pauvreté et réussite scolaire ».

En France, sixième puissance économique mondiale, 1,2 million d’enfants, soit un enfant sur dix, sont des enfants de familles pauvres [1]. Conséquence de la détérioration de la situation économique, accentuée depuis 2008, l’augmentation de la pauvreté des enfants est un fait marquant de la période récente. Pourtant on en parle peu, en tout cas moins que la question des options de facto réservées à quelques-uns au collège.

La situation est d’autant plus préoccupante que la France est l’un des pays dans lesquels l’origine sociale pèse le plus sur les destins scolaires. L’école a une part importante de responsabilité dans ce constat, mais l’échec scolaire de trop nombreux enfants issus de familles pauvres, et la relégation qui en résulte, sont aussi les révélateurs des problèmes de l’ensemble de notre société, confrontée au creusement des inégalités. (...)

A ce niveau d’inégalités, il devient absurde de parler d’égalité des chances : c’est à l’égalité des droits qu’il faut travailler.
Le rapport « Grande pauvreté et réussite scolaire, le choix de la solidarité pour la réussite de tous » (Inspection générale de l’Education nationale, mai 2015) offre donc l’opportunité de rappeler pourquoi il y a nécessité de refonder l’école, et pour qui. En réalité, c’est la même question. (...)

Refonder l’école, ce n’est pas niveler par le bas, c’est élever le niveau de tous en centrant l’attention du système éducatif en priorité en direction des plus fragiles, ceux dont les destins scolaires sont liés à leur origine sociale.

Grande pauvreté des élèves

Sans notre système de redistribution, un nombre plus important d’enfants seraient en situation de pauvreté. Il faut évidemment le dire et s’en féliciter. La grande majorité des enfants vivant en France voient leurs droits fondamentaux satisfaits. Mais les enfants en situation de pauvreté en sont partiellement ou totalement exclus du fait des conditions de grande précarité dans lesquelles ils vivent.

Dans certaines parties du territoire, l’école ne constitue plus seulement une obligation en tant que lieu des apprentissages, elle est devenue une institution d’aide aux familles, voire un refuge.

Ce sont les écoles et les établissements scolaires qui sont le plus souvent les premiers repères et les premiers recours face aux situations de détresse sociale. Les écoles et les établissements deviennent ainsi des lieux de solidarité qui sont les premiers à prendre en charge l’enfant, où s’élaborent des solutions, en particulier grâce à l’engagement et à la vigilance des personnels de l’Education nationale.

Un enfant pauvre est un enfant qui vit avec d’importantes fragilités qui peuvent l’empêcher de répondre aux exigences scolaires. Comment apprendre sereinement quand on est mal logé, mal nourri, quand on ne peut se soigner, participer à une sortie scolaire ou acheter les fournitures scolaires ?
Pour faire face à ces situations, les crédits consacrés à l’aide sociale ne sont pas à la hauteur des besoins. (...)

nous subventionnons sans restriction, au moyen d’exonérations fiscales, les cours privés d’aide aux devoirs pour certaines familles et nous mettons sous contrainte budgétaire l’aide aux devoirs gratuite indispensable aux plus démunis. Notre pays a parfois une curieuse conception de la solidarité. (...)

l’augmentation insupportable des inégalités au sein de notre école est aussi, et surtout, la conséquence des choix faits dans l’organisation même du système éducatif. Si, en dépit des réformes conduites, les inégalités sociales pèsent encore autant sur le destin scolaire de la jeunesse de notre pays, c’est que l’échec scolaire des plus pauvres n’est pas un accident. Il est inhérent à un système qui a globalement conservé la structure et l’organisation adaptées à la mission qui lui a été assignée à l’origine : trier et sélectionner. (...)

notre rapport identifie quatre leviers pour une politique globale mise au service d’un objectif unique : la réussite de tous les élèves.

 Premièrement, une concentration accrue des efforts et des moyens en direction des élèves et des territoires les plus fragiles, condition nécessaire pour une égalité des droits.

 Deuxièmement, une politique globale pour une école inclusive, c’est-à-dire une école qui s’organise pour privilégier le « scolariser ensemble » au cours de la scolarité obligatoire et permettre à tous les élèves de réussir.

 Troisièmement, une politique de gestion et de formation des ressources humaines pour réduire les inégalités.

 Quatrièmement, une alliance éducative entre l’école, les parents d’élèves, les collectivités territoriales et les associations.(...)