
Sans faire de bruit, la France a décidé d’imposer des visas aux Syriens qui
souhaiteraient transiter par son territoire pour rejoindre un autre État.
Solidaire à l’opposition en Syrie, mais peu encline à étendre cette
solidarité aux Syriens qui aspirent à bénéficier d’une protection sur son
propre territoire.
Depuis le début du mois de janvier 2013, les sites web de plusieurs
consulats français, comme celui du Liban, de la Turquie ou du Koweït,
indiquent qu’« à compter du 15 janvier 2013, les ressortissants syriens se
dirigeant vers un pays hors de l’espace Schengen en transitant par les
aéroports français devront être munis d’un visa de transit aéroportuaire »
(VTA).
Devant la difficulté pour obtenir un tel visa, cette obligation entrave
sciemment la possibilité pour les Syriens d’échapper au conflit qui fait
rage dans leur pays. Surtout, elle permet à la France de renvoyer vers leur
pays de départ les personnes dépourvues de ce visa et, par la même occasion,
elle restreint la possibilité pour certains Syriens de déposer une demande
d’asile auprès de la France, à l’occasion de leur transit par un aéroport
français.
Cette décision, s’appuierait sur le Code Communautaire des visas, qui
prévoit l’adoption d’une telle mesure « en cas d’urgence due à un afflux
massif de migrants clandestins ». Pourtant, de toute évidence, les Syriens
qui cherchent à fuir leur pays ne peuvent être assimilés à des « migrants
clandestins ».
Cette décision porte atteinte à l’exercice du droit d’asile pour les
personnes fuyant des persécutions. Elle expose également ces personnes à des
menaces sur leur vie et leur liberté en cas de renvoi vers un pays tiers qui
lui-même les renverrait en Syrie.
L’Anafé et le Gisti, saisissent donc le Conseil d’État pour faire cesser
cette atteinte grave et manifestement illégale aux droits fondamentaux de
ces personnes.
Compléments d’informations.
Le procédé n’est pas nouveau : depuis le milieu des années 1990, les États
européens, et la France plus que tous les autres, se servent, à l’encontre
des ressortissants de certains pays ciblés, du visa de transit aéroportuaire
comme d’un instrument pour dissuader l’arrivée de demandeurs d’asile sur
leur sol.
La France est - de très loin - le pays qui a instauré le plus de VTA, ayant
ajouté 23 pays à la liste commune (Afghanistan, Bangladesh, République
démocratique du Congo, Erythrée, Ethiopie, Ghana, Irak, Iran, Nigeria,
Pakistan, Somalie, Sri Lanka). Sont ainsi notamment soumis à cette
obligation les pays suivants : Angola, Burkina Faso, Cameroun, Colombie,
Congo Brazzaville, Côte d’Ivoire, Cuba, Djibouti, Gambie, Guinée,
Guinée-Bissau, Haïti, Inde, Libéria, Mali, Mauritanie, Pérou, République
dominicaine, Togo, Sénégal, Sierra Leone, Soudan, Tchad, ainsi que les
titulaires du document de voyage pour les réfugiés palestiniens et les
ressortissants russes provenant d’un aéroport situé en Ukraine, Biélorussie,
Moldavie, Turquie et Égypte.