Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
CQFD
Pour une psychanalyse de combat
Florent Gabarron-Garcia : Histoire populaire de la psychanalyse (La Fabrique, 2021)
Article mis en ligne le 28 mai 2022
dernière modification le 27 mai 2022

Qui a dit que la psychanalyse devait se tenir à l’écart de la politique ? Certainement pas Florent Gabarron-Garcia, psychanalyste et psychologue formé notamment à la clinique de La Borde, qui s’insurge contre l’idée d’une psychanalyse neutre. À travers Histoire populaire de la psychanalyse (La Fabrique, 2021), il rappelle comment cette discipline, des années 1920 aux années 1970, s’est rangée du côté des classes populaires, contribuant aux luttes pour l’émancipation et contre les inégalités sociales. Entretien.

Comment naît la psychanalyse ?

« À la fin du XIXe siècle, Sigmund Freud, neurologue de profession, a affaire à des patientes souffrant d’épilepsie ou de paralysies partielles. Les docteurs, qui par ailleurs sont tous des hommes, ont beau chercher une cause étiologique, dans l’organe, ils ne trouvent rien et soupçonnent ces femmes d’être des simulatrices. Pire, des hystériques. Elles vont alors protester et demander à être enfin écoutées. Freud prend acte, les écoute. Peu à peu les symptômes disparaissent. Il découvre ici qu’une causalité psychique inconsciente non organique – liée à l’histoire personnelle de la personne et souvent à son enfance – peut s’emparer de son corps et provoquer des symptômes. C’est comme ça que Freud fait l’hypothèse d’un inconscient. Il développera ensuite une méthode basée sur l’association libre : “Dites tout ce qui vous vient.” »

En quoi son « discours de Budapest » en 1918 est-il fondateur d’une psychothérapie populaire ?

« On a souvent l’image d’un Freud réactionnaire, pour lequel, notamment, les séances doivent être obligatoirement payantes. Mais il y a aussi celle d’un Freud qui sort de la cure type, celle du divan et de l’échange d’argent contre un flux de parole, celle qui s’exerce dans un cadre bourgeois puisqu’il faut en avoir les moyens. Un Freud qui, à l’écoute de son époque et de cette séquence géopolitique particulièrement révolutionnaire, notamment dans la Russie de 1917, appelle, dans son “discours de Budapest”, à une prise de conscience sociale en proposant à ses collègues analystes de créer des institutions à destination des plus démunis dans lesquelles les cures seraient gratuites. Il enjoint même l’État à reconnaître l’urgence de ses obligations : le malaise psychique dans la population n’est pas moins grave que la tuberculose et il faut promouvoir une psychanalyse dans la cité. Pour cela, il incite les analystes à créer des “policliniques” dans toute l’Europe. Le choix politique freudien d’inscrire ces institutions dans la cité se retrouve jusque dans l’orthographe choisie pour désigner les “policliniques” : il préfère le “i” de “politique” au “y” évoquant la multiplicité des soins. »

(...)