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Petit à petit, les jouets d’occasion font leur nid
Article mis en ligne le 21 décembre 2019

Ressourceries, sites internet dédiés, dépôts-ventes, boutiques Emmaüs, associations…les façons de rénover les jouets se multiplient et satisfont une demande croissance. Il reste à surmonter des mentalités droguées au « neuf », le lobbying des fabricants et l’inertie des autorités.

Les étiquettes, fabriquées avec des cartes de jeu, indiquent des prix 50 à 70 % moins élevés qu’en grande surface. Dans cette boutique de l’association Rejoué, dans le 14e arrondissement de Paris, on ne trouve que des jouets d’occasion. Et à quatre jours de Noël, les allées ne désemplissent pas.

Penchée sur les boîtes de jeux de société, Fabienne cherche des cadeaux pour ses neveux et nièces : « Je viens ici pour la première fois, dit-elle, car cette année, plutôt que d’acheter du neuf, on a décidé d’offrir des jouets de seconde main. » Si elle y trouve un intérêt économique, sa motivation est avant tout écologique : « Dans cette société de surconsommation, on jette tout si vite... Et les enfants se désintéressent rapidement des jouets, alors mieux vaut réutiliser. » (...)

Les chiffres lui donnent raison : selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), chaque année en France, 100.339 tonnes de jouets sont jetés, après une durée moyenne d’utilisation de huit mois. Las, l’immense majorité finit dans un incinérateur, comme l’explique Xavier Lesage, chargé de communication de l’association Rejoué : « Il y a beaucoup de plastiques différents, donc très difficilement recyclables, et il existe pour le moment très peu d’organismes de réemploi. » Outre les ressourceries, les sites internet dédiés, les dépôts-ventes ou les boutiques Emmaüs, neuf associations, dont Rejoué, se sont aujourd’hui spécialisées dans la revalorisation des jouets en France. Elles récupérent environ 200 tonnes de ces joujoux bannis de nos placards. Elles les trient, les lavent, les complètent s’il leur manque une pièce… puis les revendent dans des magasins solidaires. Qui sont tous pris d’assaut.
« Les gens ont encore peur de passer pour des radins s’ils offrent de l’occasion »

« Il y a une forte demande, constate Xavier Lesage. Surtout, les profils des acheteurs se diversifient. » Car si l’achat d’occasion a longtemps été considéré comme réservé à des personnes à faibles revenus, il séduit à présent les classes moyennes sensibles aux enjeux environnementaux. (...)

Tous les acteurs du réemploi constatent ce boum du marché de l’occasion, et les jouets ne font pas exception. (...)

Pourtant, des freins psychologiques persistent. « Les gens ont encore peur de passer pour des radins s’ils offrent de l’occasion », témoigne Marine Foulou, responsable du défi Rien de neuf à Zero Waste France. « Il y a ce cliché de la peluche crapouilleuse, renchérit Xavier Lesage, l’idée que les jouets issus du réemploi sont sales, ou trop abîmés. » Des préjugés renforcés par la publicité, « qui crée sans cesse des besoins et l’envie de la nouveauté », dénonce Sébastien Pichot. Pour surmonter ces obstacles, les organismes de la revalorisation n’ont lésiné ni sur les moyens ni sur la créativité. (...)

Dans le cadre du défi Rien de neuf, Zero Waste propose des petites cartes à joindre aux cadeaux d’occasion, cartes qui expliquent la démarche « Je contribue à préserver les ressources naturelles, je ne participe pas à la surconsommation, j’ai été choisi avec amour et créativité », peut-on y lire. « On mise sur la pédagogie, dit Marine Foulon. On veut mettre une valeur écolo et de temps à ces cadeaux, car un objet d’occasion est souvent plus personnalisé et demande du temps pour être déniché. »
Se battre auprès des autorités pour se faire reconnaître

(...)

« Le lobby des fabricants de jouets essaie de nous mettre des bâtons dans les roues, et de restreindre les jouets qu’on peut rénover et nos possibilités de vente aux acteurs publics, comme les écoles ou les bibliothèques », regrette Xavier Lesage. (...)

Les spécialistes du réemploi de jouets se mobilisent donc, dans le cadre des débats parlementaires sur la loi anti-gaspillage, pour la création d’une filière de responsabilité élargie du producteur (REP) dédiée aux jeux (...)