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Libération
Pédopsychiatrie : non au triage des enfants !
Article mis en ligne le 3 juillet 2020

Tribune. Le constat était déjà unanime et la dégradation du système de santé reconnue. A la suite des restrictions qui ont frappé l’hôpital depuis des lustres, il était de notoriété publique que la psychiatrie était naufragée… Elle avait souvent servi de variable d’ajustement à des politiques gestionnaires par trop aveugles. En son sein, les manques les plus criants concernaient la pédopsychiatrie, « déshéritée parmi les déshéritées ».

La pandémie est passée par là, avec sa dérégulation de nos vies confinées. Elle a mis en évidence, en les exacerbant, tous les écueils que peuvent rencontrer tant de jeunes, pris dans des contextes inédits, incertains et anxiogènes. Les équipes de psychiatrie sont familiarisées avec ces difficultés : au sein de structures débordées, elles les accueillent tous les jours et constatent leur incidence croissante. (...)

C’est aussi vers la psychiatrie, sanitaire comme médico-sociale, que sont orientés les enfants suivis par les services sociaux (ASE), pris dans des parcours existentiels chaotiques alternant institutions diverses, foyers de vie et familles d’accueil et qui présentent de graves troubles de l’attachement et de la personnalité.

L’ensemble de ces complications rencontrées par les jeunes confronte les équipes chargées de les recevoir en CMP comme en CMPP (1) à des situations plus que tendues dans lesquelles les professionnels tentent, malgré l’exiguïté de leurs moyens, de prioriser les cas les plus urgents tout en assurant les soins médico-psychologiques de tous.

Rupture de soins en cascade

C’est dans ce contexte de pénurie, que l’Agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine présente actuellement un plan de reconversion de ses 29 CMPP en plateformes de diagnostic précoce pour l’autisme.

On sait que, dans ce type de troubles, plus le diagnostic est précoce, plus les possibilités d’aide sont larges. Il est indispensable de démarrer tôt la prise en charge pour soulager les proches et initier un parcours de vie le plus acceptable possible pour ces enfants. Que cela nécessite un réel effort de l’Etat, malgré les succès toujours relatifs des plans autisme depuis quinze ans, est une évidence.

Il n’en reste pas moins que ce projet a été élaboré par l’ARS sans concertation aucune ni avec les professionnels ni avec les populations des territoires concernés et leurs élus. La brutalité de la démarche est inédite et va engendrer des ruptures de soins en cascade : certaines équipes ont ainsi été « sommées » de mettre fin aux traitements de leurs actuels patients dans un délai… de trois mois !

Que fait-on des 60 000 enfants suivis pour des difficultés psychologiques et psychiques et qui disposaient, sur l’ensemble de la région, de traitements pluridisciplinaires de proximité, accessibles à tous et pris en charge par l’assurance maladie ? Que fera-t-on de ceux, tout aussi nombreux, qui attendent un début de traitement ?

Dans le « cahier des charges » imposé aux CMPP, l’ARS évacue la question, les taxant sans plus de forme de « cas légers » et les renvoyant soit vers un secteur libéral quasi inexistant, soit vers les structures d’aide des écoles (Rased) démantelées depuis plusieurs années et inadaptées à ce type de prise en charge.

Un des CMPP de la région est même fermé et ses moyens redéployés en d’autres lieux, pour diagnostiquer d’autres pathologies et une autre population… les familles locales apprécieront. (...)

C’est aussi vers la psychiatrie, sanitaire comme médico-sociale, que sont orientés les enfants suivis par les services sociaux (ASE), pris dans des parcours existentiels chaotiques alternant institutions diverses, foyers de vie et familles d’accueil et qui présentent de graves troubles de l’attachement et de la personnalité.

L’ensemble de ces complications rencontrées par les jeunes confronte les équipes chargées de les recevoir en CMP comme en CMPP (1) à des situations plus que tendues dans lesquelles les professionnels tentent, malgré l’exiguïté de leurs moyens, de prioriser les cas les plus urgents tout en assurant les soins médico-psychologiques de tous.
Rupture de soins en cascade

C’est dans ce contexte de pénurie, que l’Agence régionale de santé (ARS) de Nouvelle-Aquitaine présente actuellement un plan de reconversion de ses 29 CMPP en plateformes de diagnostic précoce pour l’autisme.

On sait que, dans ce type de troubles, plus le diagnostic est précoce, plus les possibilités d’aide sont larges. Il est indispensable de démarrer tôt la prise en charge pour soulager les proches et initier un parcours de vie le plus acceptable possible pour ces enfants. Que cela nécessite un réel effort de l’Etat, malgré les succès toujours relatifs des plans autisme depuis quinze ans, est une évidence.

Il n’en reste pas moins que ce projet a été élaboré par l’ARS sans concertation aucune ni avec les professionnels ni avec les populations des territoires concernés et leurs élus. La brutalité de la démarche est inédite et va engendrer des ruptures de soins en cascade : certaines équipes ont ainsi été « sommées » de mettre fin aux traitements de leurs actuels patients dans un délai… de trois mois !

Que fait-on des 60 000 enfants suivis pour des difficultés psychologiques et psychiques et qui disposaient, sur l’ensemble de la région, de traitements pluridisciplinaires de proximité, accessibles à tous et pris en charge par l’assurance maladie ? Que fera-t-on de ceux, tout aussi nombreux, qui attendent un début de traitement ?

Dans le « cahier des charges » imposé aux CMPP, l’ARS évacue la question, les taxant sans plus de forme de « cas légers » et les renvoyant soit vers un secteur libéral quasi inexistant, soit vers les structures d’aide des écoles (Rased) démantelées depuis plusieurs années et inadaptées à ce type de prise en charge.

Un des CMPP de la région est même fermé et ses moyens redéployés en d’autres lieux, pour diagnostiquer d’autres pathologies et une autre population… les familles locales apprécieront. (...)

Des jeunes devenus invisibles

Tous les enfants méritent nos soins ! Comment expliquer qu’une majorité d’enfants se retrouvent ainsi abandonnés, au profit d’autres jeunes, minoritaires, mais porteurs de troubles plus « ciblés » ? La réponse est probablement à chercher dans leur manque de lisibilité pour les pouvoirs publics. Par la grande variété des pathologies concernées, par le peu d’action collective les soutenant, les jeunes présentant des troubles psychiques pourtant invalidants sont devenus des invisibles, notamment aux yeux du secrétariat d’Etat chargé des personnes handicapées. (...)

A l’opposé, les familles d’autistes, bien constituées en de solides associations (certains peuvent contester leurs méthodes, mais sûrement pas leur pugnacité et leur légitimité), y sont fort influentes. C’est à la République de ne pas discriminer entre ses enfants, surtout quand ils ont besoin de son soutien actif. (...)