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Orthographe, ça va chofer : des enfants écrivent à l’Académie française
#orthographe #Académiefrançaise
Article mis en ligne le 2 novembre 2022
dernière modification le 1er novembre 2022

Graphie rectifiée, succédant à la réforme de 1990 ou classique, le Conseil supérieur de la langue française n’était pas invité à cuire des madeleines en cette veille d’Halloween. Pourtant, les jeunes cuisiniers, recettes devant les yeux, ont décidé au bout de quelques fournées de montrer à l’Académie française de quel bois ils se chofent. Si, si : du verbe chofer.

Le verbe, tel qu’on le connaît plus traditionnellement n’est autre que chauffer, issu du latin classique calefacere — échauffer, chauffer, faire chauffer. L’évolution graphique, entre palatalisation et chute, non de la température, mais des éléments devenus inutiles, aura abouti au fil du temps à cette sonorité : \ʃo.fe\. Fort bien.
Chofe, Marcel !

S’appuyant dans son intervention sur le roman Magic Charly, Audrey Alwett ne l’avait pas vu arriver, cette « fronde », comme elle l’écrit avec humour. Confrontés à un léger agacement orthographique, voici les apprentis magiciens décidés à se retrousser les manches :

Une lettre ouverte, adressée aux Immortels tente de raisonner ces porteurs de sabre :

Chère Académie française,

Je ne trouve pas normal que chauffer s’écrive avec “au” et pas avec un “o”. En plus, il y a deux “f”. “Chofer” ce serait mieux.

Merci de corriger dans le dictionnaire, parce que c’est votre travail.

Cordialement,

Et ces adeptes d’une révision en profondeur du terme — âgés de 7 à 10 ans — de signer joyeusement leur missive, pour conférer à leur propos le poids du nombre. (...)

De fait, une exposition des recettes était prévue à la médiathèque et les apprentis avaient à cœur de très bien faire. Donc, sans faute.

Et survient le verbe chauffer. « Isaure était véritablement offusquée de cette graphie. “Il faudrait changer ça”, me dit-elle. Et sous sa dictée, j’ai écrit une lettre à l’Académie française, après leur avoir expliqué que c’est son travail de fixer les normes. Elle ne s’est pas déballonnée du tout, et une fois la lettre achevée, plutôt que de signer seule, cela s’est changé en pétition. »

Alors, chofer plutôt que chauffer, pourquoi pas ? « Ce n’est pas plus absurde que Bonaparte demandant de changer le genre du mot “aigle”, de féminin à masculin parce qu’il voulait en faire son symbole — et que le féminin aurait remis en question sa virilité. Alors l’Académie s’est pliée à la demande », note Audrey Alwett.

Finalement, sur les 11 participants à l’atelier, huit signeront le courrier pour réclamer une justice phonético-orthographique, quand trois autres préféreront s’en abstenir – étant, pour leur part, raccord avec l’actuelle graphie.
Académie plastique

Finalement, de cette anecdote orthographique, la romancière parvient à sortir une formule magique. « Pour m’assurer qu’ils gardent un esprit créatif, je leur ai proposé une orthographe sorcière, qui leur permettait de fixer les mots comme ils le souhaiteraient », reprend-elle. Et voici comment les enfants s’amusent à métamorphoser les termes, se réattribuant une certaine plasticité de la langue.(...)

Gloire à Rabelais en somme. Et l’autrice de conclure : « Quand ils ont écrit “parce que c’est votre travail”, il n’y avait aucune insolence. Ce sont leurs mots, comprenant que l’Académie est l’entité de référence et que l’orthographe relève de sa fonction. Qu’elle est mandatée pour ce faire. » Une demande, somme toute, très respectueuse : laissez la langue vivre…

Le tome 3 de Magic Charly sortira ce 3 novembre, et avec Arleston, Audrey Alwett publiera Le Grimoire d’Elfie (Drakoo), tome 3 également, ce 16 novembre.