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CQFD
Offensive anti-squats en Guyane
CQFD n°170 (novembre 2018)
Article mis en ligne le 29 décembre 2018
dernière modification le 27 décembre 2018

En plein centre-ville de Cayenne, une foule éructe sa haine des squatteurs. Nous sommes le 24 septembre et l’appel lancé deux jours plus tôt par la galaxie des 500 Frères contre la délinquance [1] a été entendu.

Devant le numéro 53 de la rue Madame-Payé, quelque 200 personnes sont venues déloger les occupants – essentiellement étrangers – de cette maison insalubre. Une habitante argue que le « propriétaire » des bâtiments squattés lui fait payer un loyer au noir, mais son intervention « est vite annihilée par des personnes hostiles vitupérant à son encontre » [2]. La police s’interpose entre la foule et le squat, où la maire de Cayenne vient négocier le départ des occupants – en l’absence de toute décision de justice. Un peu plus tard, un fourgon emmène les objets personnels des occupants...

Quelques semaines plus tôt, le squat avait déjà été attaqué par des membres des Grands Frères. Ce « saccage », commis par des hommes « encagoulés et détenteurs d’armes blanches », selon les mots du procureur, aurait fait trois blessés, dont une femme enceinte. Une expédition effectuée vraisemblablement à la demande de riverains se plaignant d’incivilités multiples, menaces, tapage, prostitution et trafic de stupéfiants. « Arrêtez de prendre en compte la misère des squatteurs, vous rejetez la misère des riverains », dira à une autre occasion Zadkiel Saint-Orice, porte-parole des Grands Frères [3].

Sur les forums des sites d’actualités guyanais, on trouve bien des internautes critiquant le coût des procédures d’expulsion pour les propriétaires désargentés. Certains n’hésitent aucunement à établir un lien entre squats, insécurité et…immigration.

« 350 squats évacués et il faut s’en satisfaire ?! »

Le 17 octobre, dans cette ambiance délétère et farouchement anti-squat, la télévision publique Guyane La Première consacre une émission spéciale à la problématique. (...)

Il faut ici préciser qu’en Guyane, le terme « squat » renvoie à deux réalités : les occupations urbaines de bâtiments, mais surtout les nombreux bidonvilles. Ces derniers, la loi Élan [4] ne les a pas oubliés : un article prévoit qu’à Mayotte comme en Guyane, le préfet pourra désormais les faire détruire sans décision de justice… (...)

Marius Florella, de l’antenne guyanaise du Dal (Droit au logement) : « Je suis d’accord, on peut démolir toute la Guyane, les maisons construites sans permis. Seulement, il faut me donner une solution de relogement. L’État et les communes fuient leur responsabilité : le manque de logement. […] On ne peut pas déloger les gens puis les lâcher dans la nature. »