
Tout oppose le Tea Party, soucieux de baisser le niveau de la fiscalité, et le mouvement Occuper Wall Street, révolté par le creusement des inégalités. Mais, alors que le premier continue à peser dans la société et sur les institutions, le second a (provisoirement ?) levé le camp sans avoir obtenu grand-chose. L’auteur de « Pourquoi les pauvres votent à droite » tire de ce dénouement quelques leçons cruelles de stratégie politique. Elles résonnent au-delà du cas américain.
(...) avant qu’une protestation s’élargisse en mouvement social de grande ampleur, ses protagonistes doivent d’abord réfléchir, analyser, théoriser. Le fait est que, de ce point de vue, OWS a fourni assez de matière pour alimenter un demi-siècle de luttes — sans réussir pour autant à mener la sienne ailleurs que dans une impasse.
Occuper Wall Street a réalisé d’excellentes choses. Il a su trouver un bon slogan, identifier le bon ennemi et capter l’imagination du public. Il a donné forme à une culture protestataire démocratique. Il a établi des liens avec les syndicats de travailleurs, un pas crucial dans la bonne direction. Il a redonné vigueur à la notion de solidarité, vertu cardinale de la gauche. Mais les réflexes universitaires ont vite pris une place écrasante, transformant OWS en un laboratoire où ses forts en thème venaient valider leurs théories. Car les campements n’accueillaient pas seulement des militants soucieux de changer le monde : ils ont aussi servi d’arène à la promotion individuelle de quelques carriéristes. (...)