
Ne pas haïr
Dis papa !
Dis papa ! Qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui dans la forêt de Rohanne ?
Dis papa ! Tu m’emmènes, demain, dans la forêt de Rohanne ?
Dis papa ! J’ai envie ! Il paraît qu’il y a plein d’arbres superbes ! Plein de gens gentils ! De champignons ! D’oiseaux !...
Dis papa ! Qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui dans la forêt de Rohanne ?
Dis papa ! Pourquoi t’as des marques comme çà le long du nez ? Et sur la nuque ?
Dis papa ! T’as utilisé un masque ? Un casque ?
Dis papa ! Pourquoi ?
Dis papa ! T’as lancé des lacrymogènes ? Des grenades assourdissantes ?
Dis papa ! T’as couvert la destruction d’arbres ? Quand il y avait encore des gens dedans ? (...)
ce que je refuse de tous les pores de ma peau, eh bien l’attaque féroce contre les militants montés dans les arbres, contre les arbres eux-mêmes, est en train de le réaliser : j’ai peur de basculer dans la haine, de devenir haineuse... contre les flics... contre les porteurs du projet... J’ai toujours essayé d’éviter de tomber dans ce piège, et peut-être est-il en train de se refermer.
Le problème n’est pas tant un problème moral, que celui de la pertinence politique : la haine affole, elle fait fait perdre sang-froid et lucidité. La rage, (celle de ’courage’, quand on a tordu le cou...) est moins grave... Ce dont nous avons besoin en ce moment, ce n’est pas de haine, mais de clairvoyance et détermination politique... (...)