
Assumer l’anticapitalisme et les paillettes, c’est le projet d’Akira, nouvelle plateforme politique qui présente une candidature fictive et collective à l’élection présidentielle. Si l’esthétique du mouvement tranche, le contenu rappelle d’autres initiatives de la gauche radicale, qui ont souvent tourné à vide par manque de stratégie.
(...) « Nous sommes les enfants d’une époque en flamme mais je vois les peuples entiers se lever pour la dignité », a déclamé une jeune femme, au nom d’Akira, « un nom pour toutes et pour tous », candidate fictive à la présidentielle de 2022.
« Les clowns en cravate ne nous proposent que des élections fades, réchauffées, sans goût et sans saveur, a-t-elle poursuivi pendant quelques minutes, sans être le moins du monde gênée par les agents de sécurité du lieu. Nous aurons toujours les mêmes options, voter par défaut, faire barrage ou ne pas voter du tout. Akira n’est pas une réaction à vif, mais la construction d’une force politique à la hauteur de notre époque. » À la fin du discours, dernier tour de passe-passe : c’est une autre jeune femme masquée qui quitte la cour intérieure du musée sous un jet de confettis dorés. (...)
Un format et un vocabulaire qui évoquent d’autres initiatives dans le champ des mouvements dits « autonomes » à gauche, tels que ceux menés un temps par le Comité invisible. Le site Lundi matin, assez proche du Comité invisible, a d’ailleurs relayé la vidéo d’entrée en campagne d’Akira. Dans un autre genre, François Ruffin, en organisant sa « Fête à Macron » en 2018, avait lui aussi choisi de renouveler la méthode pour faire masse, en fervent partisan de l’émotion en politique, et après la frustration de voir s’effilocher Nuit debout.
Depuis, la plateforme politique « Akira », nommée d’après un classique du manga japonais tendance « cyberpunk », a distillé, toujours sur les réseaux sociaux, quelques éléments sur le fond de cette campagne. Elle veut perturber l’aventure présidentielle face à l’urgence climatique, la montée des inégalités sociales, « le tournant fasciste et autoritaire engagé dans plusieurs pays ». Mais aussi s’inscrire dans un processus révolutionnaire adossé aux « luttes sociales », faire du combat politique une « source d’épanouissement ». Sa méthode, « massifier », notamment en utilisant à fond la viralité des réseaux sociaux.
Ces éléments de clarification n’ont pas suffi à éteindre la tempête qui s’est abattu sur Akira sur les réseaux sociaux. La séquence vidéo a fait hurler de rire et provoqué les railleries de nombre de militants de gauche, sympathisants de partis traditionnels, ou simples commentateurs passant par là. « Des bobos parisiens qui s’amusent, c’est mignon », disait l’un d’entre eux sur Instagram, résumant assez bien la réception publique de l’initiative Akira (...)
Un format et un vocabulaire qui évoquent d’autres initiatives dans le champ des mouvements dits « autonomes » à gauche, tels que ceux menés un temps par le Comité invisible. Le site Lundi matin, assez proche du Comité invisible, a d’ailleurs relayé la vidéo d’entrée en campagne d’Akira. Dans un autre genre, François Ruffin, en organisant sa « Fête à Macron » en 2018, avait lui aussi choisi de renouveler la méthode pour faire masse, en fervent partisan de l’émotion en politique, et après la frustration de voir s’effilocher Nuit debout.
Depuis, la plateforme politique « Akira », nommée d’après un classique du manga japonais tendance « cyberpunk », a distillé, toujours sur les réseaux sociaux, quelques éléments sur le fond de cette campagne. Elle veut perturber l’aventure présidentielle face à l’urgence climatique, la montée des inégalités sociales, « le tournant fasciste et autoritaire engagé dans plusieurs pays ». Mais aussi s’inscrire dans un processus révolutionnaire adossé aux « luttes sociales », faire du combat politique une « source d’épanouissement ». Sa méthode, « massifier », notamment en utilisant à fond la viralité des réseaux sociaux.
Ces éléments de clarification n’ont pas suffi à éteindre la tempête qui s’est abattu sur Akira sur les réseaux sociaux. La séquence vidéo a fait hurler de rire et provoqué les railleries de nombre de militants de gauche, sympathisants de partis traditionnels, ou simples commentateurs passant par là. « Des bobos parisiens qui s’amusent, c’est mignon », disait l’un d’entre eux sur Instagram, résumant assez bien la réception publique de l’initiative Akira (...)
« C’était dur, surtout de la part de copains, à gauche », concède Raphaël, l’un des membres d’Akira, rencontré à l’occasion d’une réunion d’information et d’accueil de nouveaux membres, organisée début novembre dans une ancienne boutique de fripes, dans le quartier de Beaubourg à Paris.
« Nous voulons combiner le spectaculaire et le travail de fond », assume, loin d’être découragé, Tito (prénom d’emprunt), autre membre du noyau dur de l’organisation, alors qu’il est interpellé par l’un des participants lors de cette réunion sur la manière de sortir de la « théâtralisation » un peu « cryptique » proposée pour le moment par Akira. « Nous savions aussi qu’on allait en prendre plein la figure. La question, c’était de savoir si, malgré tout, nous étions pris au sérieux », complète le jeune homme.
Car la vidéo au musée Carnavalet a fait deux millions de vues, et généré des centaines d’appels et de messages sur les réseaux sociaux. « C’était notre objectif : mobiliser bien au-delà de nos réseaux », ajoute-t-il. La toute nouvelle organisation l’assure également : elle veut maintenant passer à l’action sur le terrain.
Fin novembre, Akira organise par exemple un déplacement à la rencontre d’autres collectifs militants, une formation sur l’antifascisme et des collages pour appeler à la mobilisation prévue le 27 novembre contre l’extrême droite et le racisme, lancée par différentes organisations et partis. Le même jour sortira une nouvelle vidéo qui ciblera Éric Zemmour. En parallèle, des actions de solidarité sont prévues, en banlieue est de Paris notamment. Avant une nouvelle sortie d’Akira en campagne, en janvier.
Plusieurs réunions ont eu lieu à Paris, Montreuil, Bagnolet et Saint-Denis en région parisienne, des groupes se forment en Bretagne et dans le centre de la France près de Clermont-Ferrand, cinq autres seraient en « cours de structuration » selon les organisateurs, notamment à Marseille et Bordeaux. (...)
Léo, Idriss, Maya, Pierre, Tito, orateurs et oratrices ce soir-là, racontent s’être rencontrés dans les différentes strates militantes de ces dernières années : cortèges contre la loi « travail » sous François Hollande, Nuit debout, mobilisations féministes, antiracistes ou anti-islamophobie. D’autres membres animent des cantines autogérées pour venir en aide aux migrants, ont participé de près ou de loin à des organisations antifascistes, anticapitalistes, sont proches des mouvements autonomes ou anarchistes. Pour beaucoup, les manifestations gilets jaunes ont marqué un tournant.
« Akira, c’est ma première vraie expérience militante politique, détaille Léo, jeune infirmière, qui a pendant ses études donné un coup de main pour soigner les habitants d’un squat à Bordeaux, puis a participé à des collages féministes à Paris. Moi, les partis traditionnels, je ne les ai jamais compris. » (...)
Mais pour quoi faire, s’interroge aussi Nicolas, ancien activiste d’Occupy Wall Street il y a douze ans à New York, qui écoute, assez silencieux, la discussion. « L’engagement physique, le fait de marier diverses luttes au même moment, l’aspect très horizontal de ces mobilisations, c’est un truc que je recherche depuis sans relâche, explique t-il à la fin de la rencontre. Mais avec un vrai bémol, appris par l’expérience : sans objectif et stratégie claire, c’est voué à l’échec. » Akira s’interdit pourtant de pondre un programme et une stratégie ex nihilo, proche de l’idée ancienne selon laquelle les pratiques en elles-mêmes sont déjà politiques.
Tout au long des échanges et des discussions, d’autres écueils connus des mobilisations contemporaines apparaissent : la stratégie, le coût personnel de l’engagement militant, les contours et lignes rouges d’un mouvement qui se dit clairement anticapitaliste et révolutionnaire, le rapport aux institutions. « Nous voulons, l’an prochain, que les citoyens puissent voter pour Akira, tout en votant aussi pour un candidat éligible, si ça les fait flipper de s’abstenir dans le contexte actuel », précise Tito.
Idriss, lors de la présentation de l’organisation aux nouveaux, insiste aussi sur le « soin » et le souci des uns et des autres, pilier pour Akira. « On sait tous que beaucoup de gens se crament dans la lutte sociale et politique. Nous voulons donc faire extrêmement gaffe à ça, mais aussi aux rapports de domination entre nous. » (...)
D’où des circuits de décision très lâches, voire mouvants. (...)
Le souhait est de donner « la parole aux premiers concernés » dans une logique intersectionnelle assumée. Ce qui, même là, dans le petit coton ouaté de la réunion, provoque des débats. (...)
Dans son manifeste, publié il y a quelque jours, l’organisation politique affirme voir dans la « sincérité » et le refus du cynisme une « arme révolutionnaire ». À la fin de la réunion, la plupart des novices demandent à rejoindre l’organisation, visiblement plutôt séduits ou, à nouveau, « juste pour voir ». Voir jusqu’où et comment Akira compte s’y prendre pour faire vraiment « dérailler » le jeu présidentiel ?