
(...) Le dernier jour du mois de mai, pour reprendre l’expression de CNN, « quelque chose s’est cassé en Turquie ». Depuis, la nature des manifestations se modifie sans cesse mais ce n’est ni un nouvel « Occupy » ni un « Printemps » : ce serait lire l’essence de ce mouvement comme simplement anticapitaliste, ou comme la contestation de la légitimité du régime actuel.
Ce n’est pas non plus une guerre contre la charia. Il est simplement question d’un peuple qui veut être écouté. C’est le mouvement des « chapulleurs » [dérivé de « çapulcu », « pilleur », terme par lequel Erdogan a dénigré les premiers manifestants ; ces derniers l’ont depuis repris à leur compte pour désigner ceux qui défendent leurs droits, ndlr]
Ce n’est pas non plus une guerre contre la charia. Il est simplement question d’un peuple qui veut être écouté. C’est le mouvement des « chapulleurs » [dérivé de « çapulcu », « pilleur », terme par lequel Erdogan a dénigré les premiers manifestants ; ces derniers l’ont depuis repris à leur compte pour désigner ceux qui défendent leurs droits, ndlr] (...)
Ce qui a réuni tant de gens divers autour d’un appel commun, c’est la revendication de leur dignité et le désir d’être traités comme des adultes (...)
Il continue à y avoir des manifestations dans d’autres grandes villes comme Ankara et Izmir. Surtout, jour après jour, le mouvement gagne toutes les couches sociales. Abdullah Comert, ce manifestant mort durant les événements à Antakya (une petite ville à la frontière de la Syrie), travaillait comme ouvrier dans une usine d’emballage.
Une nouvelle législation qui permettra aux compagnies étrangères de chercher du pétrole en Turquie doit bientôt entrer en vigueur. Encore une loi sur laquelle le public n’a jamais eu son mot à dire.
Impossible de savoir si le gouvernement persistera ou non dans son comportement autocratique. Cependant, il est certain que la résistance est forte.
Tandis que j’écris ces lignes, l’endroit d’où jaillirent les manifestations, le parc Gezi, devient de plus en plus un lieu de réunion communautaire et pacifique, avec une bibliothèque, une épicerie gratuite et un lieu de concert. Après des jours de lutte contre la police, les manifestants y construisent ce qu’ils veulent.
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