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les eaux glacées du calcul égoïste
NE JAMAIS LÂCHER LE FIL DE L’EAU, PAR JEAN LUC MÉLENCHON
Article mis en ligne le 17 octobre 2017
dernière modification le 16 octobre 2017

(...) "Maintenant je veux parler d’une question qui passe trop souvent inaperçue dans le champ de nos sujets. Il s’agit de l’eau. Le cycle de l’eau est au coeur de tous les processus vitaux de notre écosystème. Certains savent que l’invariance des formes qui s’observe dans la nature jusque dans ses détails est directement liée à la part d’eau que chaque chose contient. Depuis plusieurs années, les équipes avec lesquelles je milite le plus intensément se sont profondément engagées sur ce front. Car il s’agit d’un front bien à l’image de notre époque. Le bien commun et la marchandisation n’y font pas bon ménage, une fois de plus. Mes lignes sont donc aussi un hommage au travail de nos amis. Des hommes comme Gabriel Amard ont payé cher leur engagement quand une société marchande d’eau payait une entreprise pour le dénigrer.

La question est arrivée à l’Assemblée nationale sous la forme d’une proposition de loi. La semaine passée était examinée en commission des lois de l’Assemblée nationale un texte sur « la compétence Eau et Assainissement » des collectivité locales. Elle émane du groupe Les Républicains ! Faut-il que l’étiquette nous interdise de regarder le contenu ? Nous avons décidé de partir des faits et des propositions. Quitte à faire nous-mêmes d’autres propositions. Pour comprendre l’enjeu, il faut saisir le contexte législatif d’une part et la situation réelle des gens démunis d’autre part.

Commençons par le contexte. La loi Nouvelle Organisation Territoriale de la République (NOTRe), votée sous le quinquennat Hollande prévoit que le pouvoir dans ce domaine soit obligatoirement transférée en 2018 des communes vers les intercommunalités. Cela va dans le sens de la réforme territoriale menée par Hollande. Elle est très hostile aux pouvoirs et libertés communales héritées de la grande Révolution qui mit fin à l’ancien régime féodal. La manœuvre vient de loin. (...)

La vision européenne telle que défendue d’une lettre de mission à l’autre par la Commission européenne dissout les villes au profit des agglomérations, structures technocratiques vide de réalité humaine. Elle magnifie aussi les très grandes régions au détriment du département et même des anciennes régions à taille humaine.

La proposition de loi de nos adversaires de LR veut revenir sur cette disposition de la loi NOTRe. Nous aussi. Pour cela et pour ne froisser personne ils proposent de rendre « facultatif » le transfert de cette « compétence Eau et Assainissement ». Ce n’est pas follement audacieux ni suffisant sur le sujet. Mais nous avons décidé de soutenir leur proposition de loi. Tout en l’amendant.

C’est cohérent avec la conception que nous avons de l’organisation de la République et la place prépondérante que doivent avoir les communes dans ce cadre. (...)

La généralisation de la gestion publique permettrait d’éviter que des intérêts privés fassent la loi du fait de leur puissance financière !

Danièle Obono et Ugo Bernalicis ont donc défendu plusieurs amendements sur ce texte visant à rendre effectif le droit à l’eau. Le but est de promouvoir sa gestion comme bien commun plutôt que comme marchandise. C’était le sens du livret thématique de la France insoumise à ce sujet. (...)

En France, ce sont 300 000 personnes qui n’ont pas accès à l’eau courante potable. Et deux millions d’autres sont dans de très grandes difficultés pour payer leurs factures. L’eau n’est pas un produit que l’on peut décider de rayer de ses priorités. À 2% de manque on a soif. A 10% on délire. A 12% on meurt ! Plus globalement, l’ONU évalue à 40 litres la quantité d’eau dont a besoin une personne pour vivre et assurer sa dignité. Nous avons donc proposé que ces premiers litres soient rendus totalement gratuits. Pour cela, il faut supprimer la part fixe du prix de l’eau. Aujourd’hui, cette part représente environ un tiers du prix. Un tiers du prix qui reste le même qu’on utilise l’eau pour boire, pour cuisiner, pour se laver ou pour remplir sa piscine. L’idée défendue par nos députés en commission des lois est celle d’une tarification progressive de l’eau : de la gratuité pour les usages vitaux jusqu’à une sur-tarification pour les usages excessifs.

Dans cette même ligne, ils ont argumenté pour la généralisation d’une disposition que les communes peuvent utiliser de manière facultative : la différenciation du prix selon la nature de l’usager. Il s’agit d’appliquer un barème de prix différent selon que l’usage soit domestique, public, agricole ou industriel. Ainsi, les mésusages de l’eau, qui gâchent cette ressource pour des raisons économiques seraient sanctionnés financièrement. Enfin, garantir le droit à l’eau c’est s’assurer que les plus démunis de notre société n’en soient jamais privés. À ce titre, l’installation de toilettes, de fontaines et de douches publiques et gratuites en nombre suffisant dans toutes les communes est indispensable. Tous ces amendements défendus par la France insoumise furent rejetés par la majorité en commission. Pourquoi ? Qui a donné mandat aux députés de « La République en Marche » de rejeter toute avancée d’un droit aussi fondamental ? Que proposent les macronistes comme alternative aux personnes qui n’ont plus accès à l’eau ? De s’en passer ? D’en acheter en bouteille ?" (...)