
Dans cette lettre ouverte, de dizaines de scientifiques, particuliers, associations demandent au ministre de la Transition écologique d’agir contre les nouvelles formes d’OGM afin de protéger la santé, l’environnement et la biodiversité.
Monsieur le Ministre,
Depuis le Grenelle de l’environnement, la France s’est dotée d’une réglementation plus stricte de la dissémination des OGM en milieu ouvert, d’un Haut Conseil des biotechnologies (HCB) ouvert aux associations professionnelles et de la société civile concernées et, depuis 2014, d’une loi d’interdiction sur le territoire national de la seule culture OGM autorisée au niveau européen, le maïs. Votre engagement constant ces dernières années sur ce dossier n’est pas étranger à tous ces acquis.
Mais de nombreuses pressions se font jour pour exonérer de toute réglementation les OGM brevetés obtenus par de « nouvelles techniques » de génie génétique. Au prétexte que ces procédés seraient plus sophistiqués que la transgenèse, désormais qualifiée d’aléatoire, leurs promoteurs refusent délibérément de reconnaître que nombre d’entre eux nécessitent une transgenèse en amont et qu’ils font tous appel aux mêmes techniques connexes que la transgenèse (cultures cellulaires in vitro puis régénération de plantes entières). Ces techniques, à l’origine de multiples modifications génétiques non intentionnelles susceptibles de générer les risques graves pour la santé et l’environnement, ont justifié la mise en place de la réglementation des OGM.
De plus, les brevets qu’elles permettent suscitent une très rapide concentration de l’industrie semencière. Il devient en effet impossible pour un paysan ou un petit semencier de sélectionner de nouvelles variétés sans utiliser des traits déjà brevetés et tomber ainsi sous la dépendance des quelques multinationales détenant les plus gros portefeuilles de brevets. Plus de la moitié du commerce mondial des semences est désormais accaparé par trois de ces multinationales. (...)
Une contamination irréversible de la biodiversité sauvage
Par ailleurs, depuis quelques années, certains OGM envahissent les champs français en contournant la réglementation. C’est pourquoi on les appelle des « OGM cachés ». Il s’agit principalement de « variétés rendues tolérantes aux herbicides » (VrTH) par des procédés de mutagenèse [1]. Ces cultures de tournesol et de colza provoquent une contamination irréversible de la biodiversité sauvage et exigent une augmentation constante des doses d’herbicide utilisées pour combattre la prolifération de ces « mauvaises herbes » tolérantes qu’elles génèrent. La croissance des bénéfices des sociétés semencières et phytopharmaceutiques ne saurait justifier les préjudices sanitaires, environnementaux et agronomiques qu’elles provoquent. (...)
les signataires de cette lettre ouverte vous demandent, Monsieur le Ministre :
- d’appliquer l’intégralité de la réglementation OGM à tous les nouveaux OGM, quelle que soit la technique de génie génétique mise en œuvre pour les élaborer ;
- de rendre obligatoire la publication de l’information sur le procédé d’obtention lors de toute demande d’autorisation de mise sur le marché de semences ;
- de suspendre l’autorisation de culture des « variétés rendues tolérantes aux herbicides » (VrTH) jusqu’à la mise en place d’une réglementation stricte permettant d’évaluer avant toute autorisation leurs impacts sanitaires, environnementaux, agronomiques et socio-économiques ;
- d’exiger que le HCB, qui est sous votre tutelle, respecte les règles élémentaires de la démocratie qui s’imposent au fonctionnement de toute instance consultative ;
- d’inscrire ces questions de protection de la santé, de l’environnement et de la biodiversité cultivée au cœur des prochains États généraux de l’alimentation. (...)