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Street Press
« Mon frère a été tué par la police d’une balle dans la tête »
Article mis en ligne le 19 janvier 2021
dernière modification le 18 janvier 2021

La famille Camara attend le 21 janvier et le délibéré du procès en appel pour savoir si oui, ou non, l’ordonnance de non-lieu sera maintenue. Elle compte continuer son combat, peu importe le résultat. Elle appelle a un rassemblement le 7 février, à Champs-sur-Marne, pour commémorer les trois ans de la mort de Gaye.

Dans la nuit du 16 au 17 janvier 2018, la police blesse mortellement Gaye Camara. Depuis, son frère Mahamadou porte le combat pour obtenir vérité et justice. Dans cette lutte, il peut compter sur le soutien des habitants de son quartier et de la mairie. (...)

Mahamadou Camara n’était pas habitué aux discours. C’est même un homme plutôt taciturne. Il jauge une personne, se fait une opinion, puis il la rencontre. C’est sa façon de faire. Mais toute cette logistique semble bousculée depuis janvier 2018 et la mort de son petit frère, Gaye Camara, tué par une balle de la police en pleine tête. « Cette affaire, j’en ai fait mon combat ! Je ne m’arrêterai qu’à ma mort. On l’a traité de voleur, de bandit, de voyou. Ils l’ont tué, puis ils l’ont sali. » Dans les couloirs du Tribunal de Paris, sa voix résonne et force l’attention de la quarantaine de personnes venues pour le soutenir, lui et sa famille. L’audience en appel du jour doit déterminer le maintien ou non de l’ordonnance de non-lieu. Voilà trois ans, presque jour pour jour, que les Camara tentent d’ouvrir l’enquête pour déterminer les circonstances de la mort de Gaye, en vain (...)

« La peine de mort a été abolie pour tout le monde, sauf pour nous ! »

Quand il prend la parole, Mamad – comme l’appellent ses proches – commence toujours calmement. La voix presque trop basse. Puis l’émotion prend le pas sur son tempérament. C’est comme une mue : son visage se transforme, ses traits se font durs et les mots semblent plus rigides, sortis du fond de ses tripes. Il devient ce militant plein de charisme, écouté et respecté. Mahamadou Camara n’est pas l’activiste contre les violences policières le plus médiatisé. Mais ceux qui le connaissent savent qu’il est de tous les rassemblements. Proche d’Assa Traoré, qu’elle considère comme son « frère », descendant du Mouvement de l’Immigration des Banlieues (MIB), le grand frère s’est investi dans une lutte qui ne s’arrête pas à la mort de Gaye. Dans sa ville de Champs-sur-Marne (77), il tente d’enrayer toutes les violences, y compris les rixes ou le traffic. Ce qui lui vaut le soutien de la mairie, mais pas que. Ce jour-là, au tribunal de l’Île de la cité, sont présents des anciens du MIB, plusieurs membres de Comités contre les violences policières, des militants de toute la banlieue parisienne, mais également des politiques, comme Olivier Besancenot, Eric Coquerel (député LFI), David Guiraud (porte-parole Jeunesse LFI) ou Mourad Hammoudi, représentant de la mairie de Champs-sur-Marne. Mahamadou, lui, poursuit sa prise de parole :

« On est dans l’obligation de se donner la main et de se soutenir. Pour nos jeunes ! Tout ce qui nous arrive ici est politique. La France n’a jamais été le pays des droits de l’Homme. Si c’était le cas, Gaye n’aurait jamais dû mourir. » (...)

l’homme de 36 ans ne parle ni des tireurs, ni des forces de l’ordre. « Je n’ai rien contre les policiers. » Il parle de la justice et de l’État. « Du système. » Plus au calme, dans son salon, le grand frère raconte comment il a tout fait pour éviter des émeutes. « Les jeunes d’ici attendaient mon go pour tout casser. » Hors de question, assure-t-il (...)

« C’est Dieu qui me l’a donné, c’est Dieu qui me l’a repris. Si vous voulez mener le combat pour que justice soit rendue à votre frère, je serai avec vous. Mais si vous brûlez ou cassez quoi que ce soit dans la ville, ne venez pas à mes obsèques. »
(...)