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"Moi, je me dis que migrant, c’est pour les animaux" Regard critique d’un Mineur Isolé Etranger sur l’usage des mots
LE BLOG DE JEUNES ISOLÉS ETRANGERS /Extrait du récit de B., mineur isolé arrivé à Paris, paru dans Lettres Communes N°2
Article mis en ligne le 6 novembre 2018

Si ça allait bien, j’aurais pas quitté mon pays pour venir en France. J’étais pas tenté de passer par la mer Méditerranée. Je vais jamais risquer ma vie. Si vous voyez aujourd’hui quelqu’un qui traverse tous ces déserts, la mer Méditerranée, là où ça ne tolère pas, par la Libye, c’est parce que ça ne va pas. Sinon, tu n’as pas besoin de risquer ta vie pour rien, de monter dans des Zodiacs, là où tu ne sais pas si tu vas arriver ou pas. On ne te donne même pas la boussole. C’est à dire, tu vas pas traverser tous ces déserts. Et pourtant, on a tellement dormi dans le désert ! On était au nombre de 100. C’est 5 personnes qui sont rentrées en Italie. C’est à dire 95 personnes ont péri et n’ont pas pu atteindre l’Italie. Donc je me dis que l’Etat se lance dans une salissure. C’est à dire, ils ne veulent pas faire leur travail. C’est pas parce qu’ils sont incapables ! Ils ne veulent pas faire leur travail, parce qu’ils sont capables. Mais ils ne veulent pas le faire. C’est tout !

Le mot « migrant », moi je me dis que ce sont des mots qui ont été créés juste pour blesser les personnes qui comprennent le vrai sens du mot. Sinon, les mots qui existaient pourquoi ne pas les utiliser, en disant « les étrangers » ? Parce que nous, dans notre pays, quand tu es français, on ne dit pas « un migrant ». En tous cas il n’est plus dans son pays. Il est dans un pays étranger. Mais nous on dit « Il est français ». Juste pour faire la différence avec les Guinéens. On dit « Lui, il est Européen. Il est français, il est anglais, il est espagnol ». On l’appelle par sa patrie. On ne dit pas qu’il est « expatrié ». On ne dit pas qu’il est « migrant ». On ne dit pas qu’il est « réfugié ».(...)

Moi, je ne me considère pas trop en tant que « migrant ». Toutes les personnes qui disent « migrants », c’est parce qu’ils ne comprennent pas bien le sens propre du mot. C’est à dire, moi je me dis que « migrant », c’est pour les animaux. C’est les animaux qui migrent. C’est l’observation. On dit « La migration des animaux a conduit à ceci, ou à cela ». Moi je me dis, le mot « migrant » ne devrait pas être attribué aux gens qui ont fui leur pays pour ne pas être maltraités. Il y a ces personnes aussi qui ont pu fuir leur pays parce que ça n’allait pas, le problème économique. On peut les qualifier de « réfugiés ». Mais, même le mot « réfugié », moi je ne trouve pas qu’il a une place pour un être humain.

J’aimerais dire aux personnes qui se considèrent comme « migrants », ils n’ont qu’à se dire que ce sont des étrangers. Avec le mot là, je suis d’accord, parce que ce n’est pas ta patrie. (...)

normalement, le mot « migrant », ça devrait pas exister aujourd’hui. Le mot « migrant », c’est juste pour les blacks qui quittent l’Afrique pour se rendre en Europe.

Moi, mon objectif… La première des choses, les personnes qui m’ont rendu service d’abord. Je dois leur rendre l’ascenseur. Parce que j’ai une dette envers toutes les personnes qui m’ont rendu service. J’aimerais devenir une personne qui rendra service aux autres personnes, parce que j’ai compris à quel point les services on m’a rendu. C’est primordial pour moi.

La deuxième des choses, j’aimerais réussir et chercher le moyen de devenir une personne pour m’exprimer. C’est à dire, ce que je veux, parler pour les personnes qui ne peuvent pas s’exprimer. M’exprimer pour qu’on m’entende, pour qu’ils sachent que nous sommes tous égaux. Quelle que soit la nature de l’être humain, nous sommes tous égaux. Quelle que soit ta religion, nous sommes tous égaux. (...)

J’aimerais être une grande personnalité pour être au service des autres.