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La quadrature du net
Mobilisation générale contre la légalisation de la vidéosurveillance automatisée !
#videosurveillance #technopolice
Article mis en ligne le 4 février 2023
dernière modification le 3 février 2023

En catimini pendant les fêtes, le gouvernement a déposé le projet de loi concernant les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024. Comme on l’attendait, ce texte prévoit d’ouvrir la voie à la légalisation de la vidéosurveillance automatisée (ou algorithmique, abrégée « VSA »), le tout sous un vernis théorique d’expérimentation limitée dans le temps. Et ce alors que partout sur le territoire, ces technologies sont déjà employées dans l’illégalité et l’impunité la plus totale.

Prenant pour prétexte l’organisation prochaine des grandes compétitions sportives, le gouvernement et nombre de parlementaires se posent en défenseurs de l’industrie française en lui permettant de s’étendre durablement sur le marché de la vidéosurveillance.

Pour rappel : la vidéosurveillance automatisée, c’est la surveillance policière massive de l’espace public pour détecter des comportements réputés « anormaux » ; c’est le suivi algorithmique d’individus « suspects » dans la rue ; c’est l’intelligence artificielle pour faire la chasse aux illégalismes populaires ; c’est, à terme, l’identification par reconnaissance faciale en temps réel et la massification de la vidéoverbalisation ; ce sont des dizaines de millions d’euros d’argent public pour des technologies dangereuses déployées sans aucun débat digne de ce nom.

Si nous voulons tenir en échec ce projet de société, il nous faut obtenir coûte que coûte le rejet de ces dispositions. Tenez-vous prêt·es pour la mobilisation ! (...)

L’opportunisme des Jeux olympiques

Le choix des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 pour tenter de légaliser ces technologies n’est pas anodin. Les JO sont un « méga-évènement » qui, par leur dimension exceptionnelle, vont permettre la mise en œuvre et l’accélération de politiques tout aussi exceptionnelles. Comme cela a pu être observé lors des précédentes éditions, ces évènements sont l’occasion d’innovations législatives sécuritaires. Les lois accompagnant les Jeux olympiques mettent systématiquement en place un cadre pour un maintien de l’ordre strict, une militarisation de l’espace public ou encore une intensification des mesures de surveillance.

Le chercheur Jules Boykoff compare ce phénomène d’accélération législative à la « théorie du choc », développée par Naomi Klein, selon laquelle les gouvernements utilisent une catastrophe ou un traumatisme social pour faire passer des mesures basées sur la privatisation et la dérégulation. (...)

en réalité, les expérimentations s’insèrent dans un projet politique plus large et satisfont les désirs exprimés depuis plusieurs années par le secteur industriel et les institutions policières d’utiliser massivement ces dispositifs. Il est donc certain que ces outils ne seront pas abandonnés après la fin de la période d’expérimentation, de la même manière que les boites noires des services de renseignement ou les règles dérogatoires de l’état d’urgence de 2015 ont été pérennisées alors qu’elles étaient censées être temporaires et exceptionnelles. D’ailleurs, des parlementaires en vue sur ce dossier, comme Philippe Latombe, évoquent dores et déjà une autre loi, plus généraliste, à venir sur le même sujet dans le courant de l’année 2023.
Un laisser-passer pour le marché de la VSA

Afin de permettre le développement de la VSA, le gouvernement a prévu un article 7 au sein du projet de loi qui propose un processus d’expérimentation découpé en plusieurs étapes jusqu’en juin 2025. Derrière cet apparent formalisme procédurier, l’article 7 constitue en réalité un tremplin pour la vente des logiciels de VSA à l’État et aux collectivités locales par le secteur privé. (...)

Comme pour beaucoup de dispositifs de surveillance, le gouvernement se justifie par une logique de prévention de risques. Et, comme souvent, ceux-ci sont si largement définis qu’ils peuvent inclure un nombre très large de situations. (...)

Qu’elle soit humaine ou algorithmique, l’interprétation des images est toujours dictée par des critères sociaux et moraux, et l’ajout d’une couche logicielle n’y change rien. Au final, elle automatise et massifie la prise de décision de la police pour mieux lui permettre d’augmenter son pouvoir de surveillance et de répression.

Afin de pousser cette stratégie de minimisation de sa surveillance, le gouvernement affirme également que ces dispositifs ne traiteraient pas de données biométriques (ce qui est faux comme nous l’expliquions ici, et comme l’a récemment rappelé le Défenseur des droits1) et qu’ils ne feront pas de reconnaissance faciale. En s’engageant à renoncer pour l’instant à cette technologie qui a une place bien particulière dans l’imaginaire collectif, il joue ici un jeu politique et stratégique de communication pour donner à la VSA une image moins dangereuse. (...)

Quant aux foules passées au crible de ces systèmes au cours de la multitude d’évènements où auront lieu les tests, elles serviront de cobayes : le projet de loi prévoit en effet que les images de vidéosurveillance « classique » encadrées par le code de sécurité intérieure pourront être utilisées comme données d’apprentissage si leur durée de conservation n’est pas expirée. Or, on apprend dans l’étude d’impact que « si la réutilisation de ces données est nécessaire à la correction des paramètres du traitement, ces dernières peuvent être conservées au-delà de ces durées, dans la limite de la durée de l’expérimentation et pour ce seul usage, afin de parfaire l’apprentissage des algorithmes ». Cela signifie que les entreprises de VSA pourront donc disposer d’un volume conséquent d’images pour entraîner leurs algorithmes. Et les citoyen·nes filmé·es deviendraient tout simplement leurs rats de laboratoire. (...)

La bataille commence

Le gouvernement avait ce projet dans ses cartons depuis longtemps. Nous ne souhaitons en aucun cas l’améliorer ou rafistoler la loi : nous voulons le rejet pur et simple de cet article 7 pour le projet de société de surveillance qu’il incarne. (...)