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l’ Express
"Madame" répond à François Morel
Par mariedonzel (Express Yourself)
Article mis en ligne le 13 mars 2012

François Morel m’a déçue. Habituellement, je bois sa chronique du vendredi matin sur France Inter comme du petit lait. Parce que sa pastille drôlatico-sensible se nourrit avant tout d’une connaissance et d’un amour des mots propices à une réelle agilité intellectuelle. Et parce que de ce fait, elle est à rebours de toute une culture actuelle de "l’humour" qui confond le dégobillage de bassesses avec l’audace desprogienne et la formule blessante avec le trait spirituel. Parce que sa chronique est intelligente, tout simplement.

Mais vendredi dernier, en profitant du débat sur la case "Mademoiselle" dans les formulaires administratifs pour faire passer les féministes pour des caricatures d’elles-mêmes, Morel m’a déçue. Pour la première fois, je l’ai trouvé en dessous de ses capacités. Pour la première fois, je l’ai trouvé injuste avec les féministes et injuste avec un mot. Injuste avec "Mademoiselle", à qui il a rendu un faux hommage, en se faisant plus l’avocat d’une insignifiante cause masculine que celui d’un "joli" vocable de la langue. Alors, moi qui aime aussi les mots, passionnément, j’ai eu envie de répondre à mon François Morel, sur ce que gagnera "Mademoiselle" à sortir des formulaires administratifs sans pour autant disparaître des dictionnaires, et surtout de l’imaginaire.

Une partie du boulot d’une féministe consiste à échapper aux caricatures (...)

le reproche le plus malhonnête qu’on fasse aux féministes est celui qui réduit leurs revendications à des luttes dérisoires : "Vous vous scandalisez des pubs machistes et vous voulez féminiser les noms de métier, mais pendant ce temps, vous ne vous fatiguez pas à obtenir l’égalité salariale ! Et puis qui s’occupe de l’excision, du viol, des foetus chromosomés XX dont on avorte dans des pays à l’ordre social impunément phallocrate ?". Comme si une féministe, forcément dotée d’un coeur et d’un cerveau étriqués, n’était pas capable de prendre fait et cause pour différents problèmes à la fois. Comme si une féministe n’était pas capable de hiérarchiser les enjeux et d’articuler tous ses combats dans un seul : celui de l’égalité hommes/femmes, partout et sur tous les plans à la fois. (...)

La liberté retrouvée de "mademoiselle", ce sera encore celle du poète ou de la poétesse, la liberté de rêver un mot, de se laisser envoûter par lui et de l’habiter en phrases, en rimes et en images, de lui inventer une vie, comme le fit la chanteuse Berry dans une radieuse composition de son premier album. "Mademoiselle" n’est ni victime de censure ni menacé de mort car Mademoiselle prend ses quartiers d’été, Mademoiselle s’accorde du bon temps, Mademoiselle va aux fraises avec qui elle veut, et convole si ça lui chante, sans que ça vous regarde.

Madame va bien, merci, elle vit sa vie (...)

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