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La Dépêche
Les salariés d’un foyer de Villeneuve-sur-Lot dénoncent une « maltraitance institutionnelle »
Article mis en ligne le 30 avril 2019

Des salariés des UEP Villeneuve se font lanceurs d’alerte. Selon eux, la dégradation des conditions de travail sur le site du foyer Corail met en danger les enfants placés par la justice et l’aide sociale. La direction dément.

« On n’en peut plus, il faut faire quelque chose, les enfants sont en danger ! »

Ils sont 9, tous salariés des UEP Villeneuve de l’association APRES (1), depuis quelques mois ou plusieurs années. Et ont tous craqué ces derniers mois, parvenant chacun leur tour à leur point de rupture conduisant à un arrêt maladie.

Ils sont 9 et ont décidé de parler pour dénoncer « la maltraitance institutionnelle » dont ils disent que sont victimes « les enfants placés au foyer Corail », foyer appartenant aux UEP Villeneuve.

Un rapport d’expertise datant de 2016 et commandé par le CHSCT dans « le cadre de risques graves constatés sur l’établissement des UEP Villeneuve », pointait déjà des dysfonctionnements importants au sein de la maison d’enfants à caractère sociale (MECS) de Pujols. Depuis, selon ces lanceurs d’alerte, rien ne s’est arrangé, au contraire.

« On ne peut plus travailler dans ces conditions, on ne reconnaît plus notre métier. Notre structure est censée œuvrer pour la protection de l’enfance : on reçoit des enfants placés là par l’aide sociale à l’enfance, par la justice. »

Des enfants orphelins ou dont les parents sont défaillants, parfois en prison, qui ont tous en commun des vies difficiles : « Surtout ils ont des carences, affectives notamment, qu’un foyer comme le nôtre, avec un encadrement, des éducateurs pour les prendre en charge, peut compenser. Or, là, on est confronté à une maltraitance institutionnelle qui ajoute de la souffrance à la souffrance des enfants. Et qui favorise la maltraitance de certains enfants par d’autres. C’est intolérable, il faut que cela s’arrête. »
« Ni formations ni moyens »

Pour l’équipe de salariés du foyer Corail, la situation s’est dégradée depuis environ 18 mois, avec l’arrivée consécutive de 3 jeunes. Les deux premiers ont des comportements qui mettent en danger les autres, une plainte pour viol sur deux jeunes filles pensionnaires du foyer est même déposée. Quant au troisième, « il est à la fois placé par l’aide sociale mais souffre aussi d’une pathologie psychiatrique. Le problème, c’est que notre structure n’est pas du tout équipée pour ça. »

Dans l’équipe, certains perçoivent ce changement de paradigme : « Des enfants souffrant de problèmes psy, il y en a de plus en plus. On n’est pas formé ni équipé pour, mais après tout si la société évolue comme ça, pourquoi ne pas aller vers cette nouvelle orientation, pour répondre à la demande ? À la condition évidemment qu’on ait des formations spécifiques et des moyens adéquats, comme un psychiatre affecté à l’établissement, des infirmières. Sauf qu’on n’a jamais eu ni de formation, ni de moyens supplémentaires. »

Pour les « anciens », c’est le principal motif de leur mal-être et de leur prise de parole aujourd’hui : « En gros, pour une question de budget, on ferme les yeux sur les contraintes. (...)"

« Nous avons signalé ces faits et ces maltraitances à notre hiérarchie qui nous répond que le problème vient de l’équipe, de son incompétence. Nous avons contacté la médecine du travail, l’inspection du travail. Rien ne bouge. Au final, nous restions pour protéger les enfants mais nous n’avons pas les moyens de le faire et nous nous mettons en danger nous-mêmes. Chacun à notre tour, nous avons pris conscience qu’il fallait qu’on s’en aille. Aujourd’hui, nous voulons dénoncer ces faits pour que les enfants, en lisant ces lignes, comprennent qu’on ne les a pas abandonnés. Qu’on se bat pour eux. Nous n’avons rien à gagner à dénoncer ces faits, au contraire, nous sommes conscients de nous mettre en porte-à-faux avec notre employeur. Mais aucun de nous n’envisage de revenir travailler : les relations sont trop détériorées avec la direction. Et la voie choisie ne correspond plus du tout à notre éthique professionnelle, à la vision qu’on se fait de ce métier. »

Et pour tous, « il y a urgence à intervenir avant qu’un drame arrive aux enfants ». (...)