
Évasion fiscale. Une étude réalisée par un organisme gouvernemental évalue à 36 milliards d’euros la sous-déclaration fiscale des grandes sociétés, en raison du gonflement artificiel des bénéfices dans les paradis fiscaux. La perte de recettes induite pour l’impôt s’élève à 14 milliards.
La France subit une perte de 29 % des recettes de son impôt sur les sociétés (IS), du fait des profits expatriés par les multinationales dans les paradis fiscaux. Au total, 14 milliards d’euros de recettes publiques ont manqué à l’appel en 2015.
Pour parvenir à cette estimation d’un phénomène par définition difficile à cerner, puisqu’il s’agit d’une « activité cachée », les chercheurs du Centre d’études prospectives et d’informations internationales (CEPII, un organisme rattaché aux services du premier ministre), ont étudié les « anomalies » observables dans « les données agrégées de la balance des paiements », où sont « enregistrés tous les échanges d’un pays avec le reste du monde ». L’auteur de l’étude, l’économiste Vincent Vicard, y a détecté une incohérence entre la situation d’« emprunteuse » de la France au plan international, et « le solde des revenus d’investissements » qui, lui, « est largement positif », du fait d’un sur-rendement des investissements français à l’étranger par rapport aux investissements étrangers en France.
Distorsions de comptes
Croisé avec les données collectées sur la localisation des profits des multinationales par la Banque de France, qui montrent un niveau de rentabilité des investissements « systématiquement plus élevé » dans les filiales situées dans les paradis fiscaux, « le différentiel de rendement peut s’interpréter comme la trace statistique laissée par l’évitement fiscal des entreprises multinationales », affirme l’étude du CEPII. (...)
Oxfam pour un impôt minimum mondial sur les bénéfices
Les ministres des Finances du G20 se retrouvent, samedi 8 et dimanche 9 juin, à Fukuoka, au Japon, pour décider l’ouverture de négociations en vue d’une réforme internationale de la fiscalité des entreprises, dites « BEPS 2.0 ». Celles-ci font suite à l’accord de 2015 appelé « BEPS 1.0 » (pour Base erosion and profit shifting agreement, accord sur l’érosion de la base fiscale et le transfert des bénéfices). L’ONG Oxfam a produit une note pour l’occasion, dans laquelle elle souligne que « la compétition fiscale menée par les différents Etat a vu le taux moyen d’impôt sur les sociétés de 94 pays passer de 28,4 % en 2000 à 21,4 % en 2018. A ce rythme, les entreprises pourraient ne plus payer d’impôt sur les sociétés d’ici 2052 ». L’ONG plaide pour que ces négociations permettent d’adopter notamment « un taux d’imposition minimum à l’échelle mondiale », comme le soutient l’OCDE. Pour Oxfam, « cette mesure ambitieuse, appliquée dans tous les pays, dissuaderait les multinationales de transférer leurs bénéfices vers des pays où les taux d’imposition sont très faibles ou nuls, ce qui marquerait la fin des paradis fiscaux, et mettrait un terme à la concurrence fiscale qui fait rage entre les pays ».