(...) je veux parler de la beauté d’une chose, d’un objet, d’un paysage, d’un livre, d’un film, de cette beauté qui vous touche au plus profond de vous-même, celle-là même, personnelle, qui provoque en vous une émotion tellement intense que vous sentez qu’il est en train de se passer quelque chose de très fort entre l’objet qui suscite cette émotion et vous-même. Un instant magique d’émerveillement, proche de ce que nous pouvions peut-être ressentir enfant, proche de cette innocence perdue, une expérience sensorielle intense, mêlant plaisir, émotion, admiration et plénitude. (...)
Si l’Art contemporain est tel qu’il est aujourd’hui, c’est justement parce qu’il reflète cette colère, cette misère, cette époque désordonnée que nous vivons et s’entend dénoncer ce malaise et nous faire réagir. Mais quel effet cette abondance de faits négatifs a sur notre vision des choses, sur notre aptitude à gérer notre vie au quotidien ?
Personnellement, j’ai fait le choix de ne plus regarder les journaux télévisés ni les programmes « négatifs ». D’abord pour épargner mes enfants de ces images indigestes et traumatisantes, préserver leur innocence et leur insouciance, les deux biens les plus précieux que nous perdons en grandissant, mais aussi pour m’épargner moi-même de ces horreurs à une période que j’estime déjà suffisamment sombre et difficile au quotidien. Oui certes il est important de savoir qu’il y a pire ailleurs et que nous vivons dans une société privilégiée. Oui, il est nécessaire parfois d’exorciser cette souffrance et cette colère d’où le rôle de l’Art Contemporain, entre autre, mais à trop nous montrer la misère, la violence et le malheur des autres, ne finissons-nous pas par angoisser, nourrir nos peurs et notre colère et ainsi freiner notre élan vital ?
C’est pourquoi, à la colère et l’indignation, que je ressens souvent bien sûr, je préfère de beaucoup me nourrir d’autres types d’émotions : admiration, étonnement, surprise, plaisir, pour apaiser mes blessures et embellir ma vie.
Je me souviens de ma première vraie expérience forte de ce type (...)