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Les banques, ces colosses aux pieds d’argile
Article mis en ligne le 3 février 2013
dernière modification le 31 janvier 2013

« Pour faciliter le financement, les garanties et l’instantanéité de tout ce commerce, le volume des transactions financières devait, lui, croître encore plus vite que le commerce lui-même. Il fallait inventer des formes entièrement nouvelles de finance, développer des dérivés de crédit, des titres garantis, des achats de pétrole à terme et autres, qui font que le système commercial mondial fonctionne beaucoup plus efficacement.

A maints égards, l’apparente stabilité de notre commerce et de notre système financier mondiaux réaffirment le principe, énoncé par Adam Smith en 1776, simple et vérifié par l’Histoire : le libre commerce d’individus travaillant pour leur intérêt conduit à une économie croissante et stable. » Alan Greenspan |1|

L’innovation financière présentée par Alan Greenspan comme une panacée a fait un grand flop tout en provoquant des dégâts économiques et sociaux très graves, sans oublier les atteintes aux droits démocratiques des citoyennes et citoyens que la dictature des marchés et les oukases de la Troïka en Europe impliquent. (...)

Les traités européens et la politique concrète des gouvernements successifs rognent progressivement les droits démocratiques conquis par les peuples : le pouvoir législatif est soumis à l’exécutif, le Parlement européen est le cache sexe de la Commission européenne, les choix des électeurs sont de moins en moins respectés… Les gouvernants se retranchent derrière les traités afin de reprendre la rengaine de Margaret Thatcher : il n’y a pas d’alternative (TINA, There Is No Alternative) à l’austérité et au remboursement de la dette. Pendant ce temps, ils font le maximum d’une part pour porter atteinte aux droits économiques et sociaux conquis au cours de 20e siècle (voir la partie 3 de cette série) et d’autre part pour empêcher qu’une nouvelle crise bancaire majeure ne survienne. Cependant, ils ne prennent aucune mesure contraignante sérieuse pour imposer aux banques et aux autres institutions financières une nouvelle discipline. (...)

Crise capitaliste

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30 janvier par Eric Toussaint

« Pour faciliter le financement, les garanties et l’instantanéité de tout ce commerce, le volume des transactions financières devait, lui, croître encore plus vite que le commerce lui-même. Il fallait inventer des formes entièrement nouvelles de finance, développer des dérivés de crédit, des titres garantis, des achats de pétrole à terme et autres, qui font que le système commercial mondial fonctionne beaucoup plus efficacement. A maints égards, l’apparente stabilité de notre commerce et de notre système financier mondiaux réaffirment le principe, énoncé par Adam Smith en 1776, simple et vérifié par l’Histoire : le libre commerce d’individus travaillant pour leur intérêt conduit à une économie croissante et stable. » Alan Greenspan |1|

L’innovation financière présentée par Alan Greenspan comme une panacée a fait un grand flop tout en provoquant des dégâts économiques et sociaux très graves, sans oublier les atteintes aux droits démocratiques des citoyennes et citoyens que la dictature des marchés et les oukases de la Troïka en Europe impliquent. Les traités européens et la politique concrète des gouvernements successifs rognent progressivement les droits démocratiques conquis par les peuples : le pouvoir législatif est soumis à l’exécutif, le Parlement européen est le cache sexe de la Commission européenne, les choix des électeurs sont de moins en moins respectés… Les gouvernants se retranchent derrière les traités afin de reprendre la rengaine de Margaret Thatcher : il n’y a pas d’alternative (TINA, There Is No Alternative) à l’austérité et au remboursement de la dette. Pendant ce temps, ils font le maximum d’une part pour porter atteinte aux droits économiques et sociaux conquis au cours de 20e siècle (voir la partie 3 de cette série) et d’autre part pour empêcher qu’une nouvelle crise bancaire majeure ne survienne. Cependant, ils ne prennent aucune mesure contraignante sérieuse pour imposer aux banques et aux autres institutions financières une nouvelle discipline. Les banques n’ont pas réellement assaini leurs comptes depuis 2007-2008. Pis, elles sont très actives dans le développement de nouvelles bulles et dans la fabrication de nouveaux produits structurés. Dans cette partie |2|, sont passés en revue les acrobaties des banques pour se financer, leur dépendance quasi-totale à l’égard des aides publiques, les bulles spéculatives en progression, les innovations financières spéculatives, les effets désastreux produits par le système bancaire actuel notamment dans le domaine de la crise alimentaire ainsi que les nouveaux risques que son mode de fonctionnement fait courir aux peuples |3|.

Les problèmes de financement à moyen et long terme

Regardons d’abord du côté du financement (c’est-à-dire du côté du passif des banques). Les banques rencontrent de gros problèmes. Les investisseurs institutionnels (fonds de pension, assurances, banques, fonds souverains…) ne leur font pas confiance, ils hésitent à acheter les obligations (covered bonds) que les banques émettent pour se financer à long terme de manière stable. Même si quelques banques comme BNP Paribas et Société Générale (les deux premières banques françaises), ou encore BBVA (la 2e banque espagnole), ont réussi à vendre des obligations, les montants totaux émis en 2012 semblent tout aussi faibles que les années précédentes. D’après le Financial Times, ce serait même la plus mauvaise année depuis 2002 |4|.

Du coup, comme elles ne trouvent pas suffisamment de financement à long terme sur les marchés, elles dépendent de manière vitale du crédit sur 3 ans accordé par la BCE pour un montant de 1 000 milliards d’euros à un taux de 1% |5|, et plus généralement des liquidités mises à leur disposition par les pouvoirs publics des pays les plus industrialisés via les banques centrales (à commencer par la Fed, la BCE, la Banque d’Angleterre, la Banque nationale de Suisse et la Banque centrale japonaise).

Les problèmes du financement à court terme

Une grande partie de leur financement, outre les dépôts de leurs clients dont le volume n’augmente guère vu la crise, doit être trouvée à court terme. Selon le rapport Liikanen, les grandes banques européennes ont besoin de 7.000 milliards de financement au jour le jour |6|. Le montant des dettes bancaires à très court terme a fortement augmenté entre 1998 et 2007, passant de 1.500 à 6.000 milliards. De 2010 à 2012, il s’est maintenu à 7.000 milliards ! Où trouvent-elles ce financement à court terme ? Elles ne le trouvent plus ou si peu sur le marché interbancaire car les banques se méfient trop les unes des autres que pour se prêter de l’argent. Elles dépendent donc des Money Market Funds (qui disposent de 2700 milliards de dollars au jour le jour) dont la disponibilité varie au gré de la crise en Europe |7|. Les MMF ont fermé le robinet à partir de juin 2011 et l’ont rouvert quand la BCE a prêté 1000 milliards |8|. A tout moment, ils peuvent à nouveau fermer le robinet ou en restreindre fortement le débit. La source la plus sûre de financement là-aussi, ce sont les banques centrales. La BCE prête désormais de l’argent massivement à 0,75% (taux en vigueur depuis mai 2012).

La conclusion est claire : sans le prêt de 1000 milliards à trois ans auquel s’ajoutent les prêts quotidiens de la BCE et des banques centrales membres de l’eurosystème (auxquelles il faut ajouter notamment la banque d’Angleterre et la Banque nationale de Suisse), de nombreuses grandes banques européennes seraient menacées par l’asphyxie et la faillite. C’est une preuve supplémentaire du fait que les banques n’ont pas assaini leur bilan. Elles doivent se financer massivement à court terme alors que du côté de leurs actifs, elles détiennent des produits à maturité longue dont la valeur est tout à fait aléatoire. Dans beaucoup de cas, la valeur des actifs inscrite au bilan ne se concrétisera pas lors de l’échéance du contrat et les banques devront enregistrer une perte qui risque d’engloutir les fonds propres.

Pas de financement via la Bourse

Du côté de la collecte de capitaux via la Bourse, la situation est aussi bouchée. Le prix des actions des banques a été en moyenne divisé par cinq depuis 2007 |9| (voir tableaux en annexe). Les investisseurs institutionnels (assurances, fonds de pension, autres fonds de placement, banques…) hésitent très fort à acheter des actions de sociétés qui sont toutes en difficulté. C’est d’ailleurs une preuve supplémentaire de la distance abyssale qu’il y a entre le fonctionnement théorique du capitalisme selon ses promoteurs et la réalité. En théorie, la Bourse doit permettre de collecter, sur du long terme (les actions sont considérées comme des placements long terme qui doivent être conservés au moins 8 ans), des capitaux pour les entreprises qui y sont cotées : cela ne marche pas car la Bourse n’est plus depuis longtemps le lieu où se financent les entreprises mais un espace de pure spéculation. C’est pour cela que les banques ont besoin d’une recapitalisation financée par les pouvoirs publics.

En revanche, toujours selon la théorie, une autre fonction de la Bourse est d’indiquer par l’évolution du prix des actions la valeur réelle des entreprises. De ce point de vue, la chute moyenne de 80% de la valeur boursière des banques constitue un diagnostic très gênant pour leurs patrons et pour les propagandistes du système capitaliste.

Ajoutons que les banques utilisent une partie des liquidités mises à leur disposition par les banques centrales pour racheter leurs propres actions. Cette mesure a deux objectifs : tenter d’empêcher la poursuite de la baisse des cours d’une part, rémunérer les actionnaires d’autre part |10|.
Des banques financées par l’argent de la drogue


Une autre source du financement des banques provient de l’argent de la drogue. Le 26 janvier 2009, Antonio Maria Costa, Directeur de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (UNODOC), a déclaré au magazine autrichien en ligne profil.at |11| que certains crédits interbancaires avaient été récemment financés « par de l’argent provenant du trafic de drogue et d’autres activités illégales ». Dernièrement, en décembre 2012, HSBC (Royaume Uni, deuxième banque au niveau mondial en terme d’actifs) a accepté de payer une amende record de 1,92 milliards de dollars |12| aux autorités américaines pour mettre fin aux poursuites dont elle faisait l’objet notamment pour blanchiment de l’argent que lui ont confié les cartels mexicains de la drogue |13|.
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