
Les États généraux des migrations, qui réunissent des centaines d’organisations et collectifs citoyens, ont tenu leur première session ces 26 et 27 mai à Montreuil. Leur objectif : rendre visible cette « France solidaire » qui œuvre tous les jours pour faire respecter le droit et les grands principes d’hospitalité, et partager les expériences de cette multitude de réseaux locaux. Les participants se sont mis d’accord sur un manifeste pour une autre politique d’accueil, vraiment « respectueuse des droits fondamentaux et de la dignité des personnes », et alternative à la politique répressive du gouvernement.
(...) « Nous n’espérons plus peser sur le texte, cela fait longtemps que le dialogue est rompu avec le gouvernement », expliquaient en chœur plusieurs associations réunies ce week-end à Montreuil dans le cadre des États généraux des migrations.
Le dialogue a pourtant été tenté de la part du mouvement associatif. (...)
Face à cette fin de non-recevoir du chef de l’État, un vaste mouvement se structure dans les mois qui suivent : le 21 novembre 2017, les États généraux des migrations sont officiellement créés et lancent une grande concertation citoyenne à l’échelle du territoire français. Avec un double objectif : relater et inventer. « Ce sont les deux rôles de ces États généraux des migrations, explique Nathalie Péré-Marzano, déléguée générale d’Emmaüs International et membre du comité d’organisation. D’une part, on raconte les situations inadmissibles vécues sur le terrain ; d’autre part, on montre toutes les alternatives possibles à la politique migratoire actuelle. Il s’agit de dire qu’on peut défendre un tout autre projet politique d’accueil ».
Verdict, six mois plus tard, ce sont près de 1650 organisations et collectifs qui ont pris part à l’un des 800 événements locaux organisés, depuis, dans le cadre de ces États généraux. Dont émane, pour l’heure, 86 cahiers de doléances qui ont été rédigés par les assemblées locales à l’issue de ces consultations. Une métaphore à peine voilée à la Révolution française, que certains n’hésitent pas à filer (...)
Un petit guide pratique pour l’accueil des migrants
Mais pas question de couper des têtes pour autant : le collectif a par exemple rédigé à l’attention des élus un petit guide pratique pour l’accueil des migrants au niveau des communes. L’outil est désormais accessible à l’ensemble du territoire grâce à la plateforme des États généraux, qui offre une mise en réseau particulièrement utile, selon les différents animateurs locaux : « Les assemblées locales ont permis de fédérer les associations existantes, qui travaillaient de manière un peu trop isolée jusqu’à présent, rapporte Thierry Lerch, membre du Réseau éducation sans frontières (RESF) en Hérault et représentant de l’assemblée locale de Montpellier. Nous avons identifié deux problématiques principales, les dublinés et les emprisonnements de mineurs, et nous nous sommes concertés pour y réfléchir ensemble ».(...)
C’est pour partager tous ces retours d’expérience qu’une première session plénière s’est donc tenue ces 26 et 27 mai, à l’Hôtel de Ville de Montreuil. Deux jours de discussion qui ont réuni près de 500 participants venus de toute la France. Le mouvement prend de l’ampleur, à en croire les organisateurs : « Nous étions une vingtaine d’assemblées locales en janvier, nous en sommes aujourd’hui à 106 réparties sur 76 départements différents, et il continue de s’en créer chaque semaine ».
L’existence d’une France solidaire
Une sacrée bouffée d’espoir pour ces mouvements citoyens, confrontés à un contexte d’ensemble particulièrement tendu : ces derniers jours, trois migrants ont trouvé la mort à la frontière franco-italienne dans les Alpes ; tandis qu’à Paris, les 1500 exilés installés dans un camp sauvage sur les bords du canal Saint-Martin depuis quelques semaines se retrouvent les otages de basses stratégies politiciennes de la part du ministre de l’Intérieur. Cela sur fond de criminalisation accrue des militants défenseurs des droits, à l’image du procès des « trois de Briançon » qui doit se tenir ce jeudi, à Gap [2]. (...)
Ce dimanche, à l’issue des échanges, l’ensemble des participants se sont accordés sur un texte faisant office de manifeste, un « socle commun pour une politique migratoire respectueuse des droits fondamentaux et de la dignité des personnes », que Basta publie en parallèle. Une façon de faire entendre, noir sur blanc, leur message à l’égard du Gouvernement : en dépit de la future loi, l’heure du découragement, elle, n’est pas encore arrivée.