
Marilyn Moureau, une détenue, a été remerciée par son employeur. Elle attaque devant les prud’hommes. Un cas d’école intéressant pour les 17 500 détenus qui travaillent. Sans contrat.
Quand on est démarché par un centre d’appels, on peut tout imaginer, y compris que le téléopérateur se trouve dans un pays lointain. Mais peu de gens se figurent, en recevant l’appel d’un opérateur téléphonique, qu’il provient d’une prison française. (...)
Dès avril 2011, Marilyn Moureau a été « déclassée », c’est-à-dire remerciée, pour avoir téléphoné à sa soeur pendant le travail. MKT Societal, l’entreprise qui gérait le centre d’appels d’une vingtaine de téléopératrices, avait demandé ce « déclassement ». « Malgré des objectifs affichés de « social business » cingle Me Arakélian, l’avocat de Marilyn Moureau : « Quand on paye les gens 2 € à 3 € bruts de l’heure, je n’appelle pas cela du business social, mais de l’exploitation ». C’est en effet le tarif horaire qui était pratiqué. Rien d’extraordinaire en prison où le salaire minimum de référence dépasse à peine 4 €. C’est que le lien entre employeur et travailleur dans les ateliers des prisons est complètement dérogatoire. Pas de contrat de travail, pas de cotisations chômage, pas de congés... Il est même des prisons où le travail ne mérite pas salaire, mais seulement « des compensations en termes d’ouverture de cellule et de liberté de circulation ». (...)
En prison, il faut à tout prix pouvoir cantiner, c’est-à-dire améliorer l’ordinaire. L’administration pénitentiaire ne consacre en effet que 3 € par jour et par détenu à la nourriture.