
Vendredi s’est achevé le débat public sur la politique énergétique de la France. Les premiers résultats plaident pour un développement plus rapide des énergies renouvelables, un rééquilibrage du mix électrique et une transition énergétique plus juste. Reste à savoir si cet avis sera pris en compte, car le brouillon de la PPE sera dévoilé avant le rapport de synthèse du débat public.
Le rapport final du débat ne sera livré qu’en septembre, alors qu’une première version de la PPE devrait être dévoilée au mois de juillet.(...)
Au terme de cette matinée, le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a plaidé pour un développement rapide des énergies renouvelables et promis un « échéancier » précis d’ici à la fin de l’année sur la fermeture de réacteurs nucléaires. « Aucun objectif ne doit compromettre l’autre : on doit fermer nos centrales à charbon d’ici 2022 au plus tard, on doit réduire notre consommation, on doit fermer (la centrale nucléaire de) Fessenheim, et dans le même temps on doit commencer à fermer des réacteurs mais tout en gardant une sécurité d’approvisionnement », a-t-il déclaré, avant de poursuivre : « Je souhaite qu’à la fin de l’année on ait un calendrier précis avec une date précise, un échéancier [et] qu’on sache quels réacteurs et le nombre de réacteurs ». Pour rappel, M. Hulot avait annoncé en novembre l’abandon de l’objectif de réduire la part du nucléaire à 50 % du mix électrique dès 2025, arguant que cet objectif ne pourrait être tenu sans ouvrir de nouvelles centrales thermiques et donc accroître les émissions de gaz à effet de serre du pays.(...)
Cette déclaration est intervenue alors que les premiers résultats du débat public suggèrent que les Français sont très attachés à l’objectif de réduire la part du nucléaire à 50 % du mix électrique, le plus rapidement possible. Ainsi, 50 % des 11.058 répondants [2] au questionnaire de la PPE ont estimé qu’il fallait atteindre cet objectif avant 2035. 44 % des participants au G400, un groupe de 400 personnes – autant d’hommes que de femmes – tirées au sort en fonction de leur lieu de vie et de leur activité professionnelle (cadres, ouvriers, agriculteurs...) et réunies le 9 juin à l’Assemblée nationale pour débattre des questions énergétiques, ont même indiqué qu’ils étaient attachés à la réussite de cet objectif dès 2025, la date prévue par la loi de transition énergétique. (...)
Sur les autres aspects de la politique énergétique, les résultats du questionnaire dévoilent quelques grandes critiques faites par les participants à la politique énergétique de la France. (...)
« Le sentiment qui ressort du débat est que la lisibilité des politiques publiques n’est pas très évidente », a pointé M. Archimbaud, avant de citer le maquis des dates et des échéances – 2025, 2028, 2030, etc. –, l’absence de scénario clair de l’Etat en matière de consommation électrique alors que ceux établis par RTE, EDF et Enedis diffèrent les uns des autres, et l’empilement de seuils et de normes. Pour autant, les participants se sont montrés attachés aux grands objectifs et principes de la PPE, revendiquent d’agir en faveur de la transition énergétique (épargne, auto-réhabilitation de logement, projets collectifs) mais réclament de nombreuses améliorations dans sa mise en œuvre. (...)
« Le report de la date de fermeture de Fessenheim interroge les participants, le refus de fermer d’autres réacteurs avant une date lointaine passe assez mal, a observé le président de la commission particulière du débat public (CPDP) Jacques Archimbaud. La demande pressante de décider dès à présent de la construction d’un nombre indéterminé d’EPR, l’engagement parfois perçu comme subreptice d’un programme de carénage au périmètre mal défini, tout cela apparaît aux yeux d’une frange des participants comme une position d’attente, au fond maximaliste et dilatoire. (…) Des signaux qui apparaîtraient déséquilibrés ou asymétriques en matière de nucléaire ou le report sine die des 50 % seraient perçus comme extrêmement négatifs, au regard de la mobilisation pour la transition énergétique. D’après la commission, il ressort donc clairement du débat que le texte de la PPE devrait comprendre un échéancier net et des procédures claires de fermeture des réacteurs. »(...)
42 % des répondants au questionnaire trouvent que les efforts demandés aux habitants en matière de transition énergétique sont socialement injustement répartis (76 % dans le G400). Sont mis en cause la fiscalité écologique, qui risque de frapper plus durement ceux qui sont captifs des énergies fossiles, la concurrence dans le secteur de l’énergie qui « n’est pas vécue du tout comme ayant eu des effets positifs sur les prix », et le fait que la transition créera plus d’emplois qu’elle n’en détruira.(...)
Désormais, que faire des idées et des critiques qui ressortent de ce débat public ? C’est là que le bât blesse. En effet, le gouvernement a prévu de dévoiler une première version du décret au mois de juillet, alors que la commission particulière du débat public ne rendra son rapport qu’en septembre. « Ce n’est pas faire preuve de mauvais esprit que de s’inquiéter d’un calendrier qui verra la publication de la première version de la PPE alors que les conclusions du débat n’auront pas été intégralement rendues »(...)
« Quel serait le sens de cette consultation si elle n’influençait pas la décision publique ?, s’est pour sa part interrogée la présidente de la CNDP Chantal Jouanno. Parce que j’observe une tendance à multiplier les consultations, avec un marketing politique à peine voilé.