
En juin 2018, un tweet de Cédric Herrou dénonce les propos d’Eric Ciotti disant qu’il faut renvoyer les 630 rescapés du bateau humanitaire l’Aquarius en Libye, où l’esclavagisme, la torture, la mort, le viol les attendent lui vaut une nouvelle plainte pour diffamation.[i]
En mai 2018, une photographie volée de plusieurs membres de notre association DTC – Défends ta citoyenneté, dont Cédric Herrou, en train de faire un doigt d’honneur à Cannes déchaîne l’extrême droite sur la toile.[ii]
En juin 2017, un tweet de Cédric Herrou établissant un parallèle entre la complicité de la SNCF durant la Seconde Guerre Mondiale pour la déportation des juifs et l’implication de la SNCF actuelle dans le renvoi illégal de demandeurs d’asile en Italie lui vaut une plainte du préfet des Alpes Maritimes pour injure publique.[iii]
Pendant ce temps-là, en France, en Europe, en 2018…
Pendant ce temps-là, des demandeurs d’asile sont toujours refoulés illégalement à nos frontières, sans aucun accès à leurs droits. Pendant ce temps-là, le préfet des Alpes-Maritimes, entre autres[iv], continue d’être condamné pour ces faits.[v] Des demandeurs d’asile, dont des femmes avec des bébés, sont toujours à la rue, sans être hébergés par l’Etat comme l’exige la loi. Pendant ce temps-là, des demandeurs d’asile continuent d’être renvoyés d’un pays à un autre, sous couvert de l’inefficace règlement Dublin.[vi]
Pendant ce temps-là, nos députés et sénateurs français travaillent un projet de loi qui criminalise les demandeurs d’asile, et restreint encore plus le peu de droits auxquels ils n’ont déjà pas accès.[vii]
Pendant ce temps-là, des militants d’extrême droite organisent des rassemblements racistes(...)
Pendant ce temps-là, notre humanité s’essouffle.
Et pourtant…
Des centaines de milliers de Français, et d’Européens s’organisent pour venir en aide aux réfugiés[xxiii]. Des hébergements improvisés naissent tous les jours, l’hébergement citoyen se développe. Une initiative citoyenne européenne, We are welcoming Europe[xxiv], est en cours.
Des instances nationales indépendantes publient régulièrement des rapports plus qu’alarmants sur la situation[xxv].
Des élus prennent parti[xxvi], et tirent la sonnette d’alarme.
Des centaines de pétitions fleurissent de toute part, interrogeant nos valeurs républicaines de fraternité et d’égalité, appelant à l’action[xxvii]. Des dizaines de manifestations, de marches symboliques[xxviii], d’actions sont organisées quotidiennement.
Des centaines d’organisations[xxix], d’experts, des personnalités dénoncent ce capharnaüm saisissant.
Des centaines de romans, de documentaires, de films, de chansons, témoignent d’une réalité brûlante.
Aujourd’hui, et plus que jamais, nous sommes indignés. Et nous sommes profondément choqués.
Nous sommes stupéfaits de voir des élus qui ne se rendent pas comptent que l’Histoire se répète.
Nous assumons la provocation comme méthode pour ouvrir les yeux de nos concitoyens et de nos élus, pour dire haut et fort que nous ne valons ni plus ni moins que nos concitoyens de 1940, pour dire que nous ne sommes pas à l’abri de commettre des atrocités semblables. Et nous sommes loin d’être les seuls à le dire.[xxx]
Nous sommes pétrifiés que quelques tweets ou photos dérangeants puissent provoquer indignation forcée et cris d’orfraie, alors que nous faisons face à une réalité historiquement tragique[xxxi].
Cette réalité est complexe, mouvante, et elle n’est pas toujours compréhensible. Ensemble, nous devons la rendre audible et compréhensible.
Nous devons remettre le curseur de l’indignation à sa place.
Indignons-nous, mais pour les bonnes raisons.