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Le Figaro Magazine a toujours tenu un discours de déploration sur l’école, rien de nouveau.
/Ludivine Bantigny, historienne
Article mis en ligne le 14 novembre 2021

Le Figaro Magazine a toujours tenu un discours de déploration sur l’école, rien de nouveau. C’est lui qui avait lancé l’une des premières grosses polémiques scolaires médiatiques à teneur identitaire ; c’était en 1979, et aux manettes il y avait Alain Decaux, je vous raconte

(...) Vous voyez déjà le même registre de discours : l’alerte sur le mal fait à nos/vos enfants.
En 1979 à l’école primaire, on enseigne les activités dites d’éveil. Un héritage de l’éducation nouvelle qui visait à décloisonner les disciplines et à insister sur les pédagogies actives
Dans ce cadre, on avait supprimé (en réalité, pas exactement, plutôt suspendu) les programmes disciplinaires et on incitait les instit’s à être un peu inventifs, faire des sorties etc. et à cesser l’enseignement traditionnel du récit national (...)

Pour mon livre "sur l’enseignement de l’histoire" chez @LibertaliaLivre j’étais allée voir les archives disponibles sur le sujet et j’avais trouvé des exemples de séquences hyper intéressantes proposées par des enseignants à partir de sorties scolaires
Mais dans l’ensemble la recherche s’accorde à dire que les profs ont plutôt continué les anciens programmes, plus rassurants, plus routiniers, comme ils l’avaient toujours fait. Cf la thèse de Benoît Falaize

Pourtant une instit’ alerte Decaux alors qu’il fait une conf à Vichy (hi hi). Dans le Fig mag il dira qu’il était impossible de ne pas tomber sous le charme ...
Et elle lui raconte que c’est horrible, on n’enseigne plus l’histoire de France !
Alors Alain prend son bâton de pélerin et alerte tout son réseau : l’heure est grave, la civilisation est à deux doigts de s’écrouler, les enfants ne vont bientôt plus aimer la France, il faut réagir de toute urgence. D’où cette Une.

Une énorme machine se met en route à 2 ans de la présidentielle. De la gauche à l’extr-droite, tout le monde s’empare du sujet. Mitterrand fait figurer une réforme de l’enseignement de l’histoire dans son pg présidentiel. Debré propose une loi pour enseigner l’hist nationale !

Des colloques, des articles, des émissions télé etc. Tout le monde donne son docte avis sur le sujet. Je le raconte dans ma thèse et on peut lire aussi une analyse de la controverse ici : histoire-politique.fr/index.php ?nume…
Pour aller vite, cela donnera les programmes de redressement nationalo-républicain de Chevènement en 84-85.

Pour autant le Fig Mag va-t-il lâcher l’affaire ? Evidemment que non, le roman n’est jamais assez national pour lui ... (...)

Et il y a dix ans, ils ont lancé une autre grosse offensive que nous avons analysée en parlant de "vague brune sur l’histoire de France" ici
blogs.mediapart.fr/edition/aggior

Avec @aggiornamentoHG nous avons fourni une analyse détaillée des tenants et aboutissants de ce dossier honteux (vous voyez encore le vos/nos enfants ?). Il est clair que tous les registres du discours de l’extreme droite sont déjà là : les profs fabriquent de l’"Anti France"

L’apologie du roman national est un marqueur politique très fort pour comprendre l’orientation idéologique des propositions. Rappelons que MLP mais aussi Valérie Pécresse ou Bruno Lemaire en font un axe de campagne.
A l’époque évidemment on nous avait qualifiés de "gauchistes"
Beaucoup de nos collègues ont trouvé l’expression "vague brune" un tantinet exagéré. Pourtant il s’agissait déjà de ça. Et le dossier d’hier du Fig mag ne fait qu’en reprendre la trame avec une nouvelle grammaire alarmiste : wokisme, décolonial etc. C’est exactement le même débat

Nous n’avons pas été très soutenus (et même été fortement critiqués) et aujourd’hui, ce n’est plus sur l’histoire de France seulement que s’abat la vague brune, c’est sur l’école.

"Vague brune sur l’école", c’est ce papier qu’il faudrait écrire. (...)

Et naturellement je pense à Suzanne Citron et j’aimerais que dans tous les débats à venir sur les instrumentalisations politiques de l’histoire, son nom ne disparaisse pas or je ne la vois pas beaucoup citée en ce moment.
Je suis heureuse qu’elle ne voit pas ce qu’il se passe Et naturellement je pense à Suzanne Citron et j’aimerais que dans tous les débats à venir sur les instrumentalisations politiques de l’histoire, son nom ne disparaisse pas or je ne la vois pas beaucoup citée en ce moment.
Je suis heureuse qu’elle ne voit pas ce qu’il se passe (...)

La filiation est assumée. L’auteur de ce tweet est en effet le responsable du dossier 2011 sur l’enseignement de l’histoire. CQFD :