
Le smartphone, ce pharmacon que l’on ignore.
Les écrans possèdent des « pouvoirs à la fois toxiques et curatifs expliquait Bernard Stiegler lors d’un colloque intitulé « Les enfants face aux écrans » à Paris le 30 avril 2014. Cela justifie l’utilisation du terme de pharmacologie à leurs propos. La pharmacologie « est la discipline scientifique qui explore les mécanismes d’interaction entre une substance active et l’organisme dans lequel elle est censée agir dans un but thérapeutique ».
« Bernard Stiegler nous rappelle qu’en Grèce ancienne, le pharmakon désigne à la fois le remède, le poison et le bouc-émissaire. Comme un médicament, tout objet technique est pharmacologique, dans le sens où il possède un pouvoir curatif lorsqu’il est utilisé raisonnablement, en suivant les préconisations et les conseils avisés, ainsi qu’un pouvoir destructeur lorsqu’il est utilisé sans mesure ni restriction.
La fonction de bouc émissaire est alors invoquée pour justifier la surconsommation d’internet, de réseaux sociaux, de jeux ou des moyens de communication qu’offre le smartphone. À ce sujet, Pierre Marc de Biasi, directeur de recherche émérite au CNRS, précise que cet outil « n’est qu’un instrument à travers lequel ce sont les pathologies de notre propre société qui s’expriment et s’exacerbent ». Torald Sollman explique que « toute substance capable de perturber les mécanismes physiologiques est une drogue ». Dans le cas des écrans, et plus précisément ici dans celui du smartphone, cette substance résulte de l’utilisation de l’outil et de son contenu, qui produisent différents effets sur le moral, le corps et les mécanismes tels que le sommeil, l’appétit ou encore la libido.
Des effets sur la relation parent-enfant
L’utilisation intensive du smartphone, provoque des effets néfastes sur la santé physique et psychologique, ainsi que sur le lien social ou plus spécifiquement sur le lien parent-enfant. Un grand nombre de professionnels du sanitaire et du social depuis la dernière décennie a pu constater ces impacts nocifs.
Ce n’est pas l’addiction, avérée ou non, qui pose problème dans la relation parent enfant, c’est tout simplement la captation de l’attention qu’il provoque. Sans être addict, vous pouvez tout autant garder le nez sur votre smartphone alors que vous marchez dans la rue ( 65 % des piétons reconnaissent consulter leur téléphone en marchant sur le trottoir ou en traversant un passage piéton).
Il en est de même lorsque vous êtes avec votre enfant. Il peut chercher à capter votre attention, alors que vous avez les yeux rivés sur votre smartphone. Le tout petit apprend à communiquer et partage ses sentiments à travers le regard de ses parents qui est pour lui un précieux indicateur. La rupture de ce lien lui est néfaste comme le montre une expérience décrite dans ce mémoire. (...)