
La justice confirme les critiques des opposants à la centrale biomasse de Gardanne (Bouches-du-Rhône). Le tribunal administratif de Marseille a annulé l’arrêté préfectoral d’exploitation de la centrale ce jeudi 8 juin.
Les hasards de calendriers font parfois bien les choses. Ce jeudi 8 juin, le tribunal administratif de Marseille a prononcé l’annulation de l’autorisation préfectorale d’exploitation pour l’unité biomasse de la centrale thermique de Provence, située à Gardanne. A Essen, en Allemagne, se tenait au même moment l’assemblée générale des actionnaires d’Uniper, société propriétaire du site des Bouches-du-Rhône. Présent au siège de l’énergéticien, Nicholas Bell de SOS Forêt du Sud a « annoncé la nouvelle aux 1200 actionnaires réunis », dit-il à Reporterre. Il représentait 80 petits actionnaires décidés à porter la contestation au cœur même d’Uniper. « C’était important que tout le monde entende en quoi ce projet est un problème pour le climat » expose le militant.
Autorisée en 2012, l’exploitation de la biomasse comme source d’énergie pour la production d’électricité devait démarrer à Gardanne fin 2014. Mais les exploitants, E.ON puis Uniper, n’ont eu de cesse de repousser la date de mise en service. Officiellement parce que la période d’essais avait besoin de se poursuivre. Initialement au charbon, la tranche 4 de la centrale est en cours de transformation pour brûler du bois.
Municipalité et section CGT de la centrale y voient l’opportunité de maintenir près de 80 emplois. Quant aux opposants, ils dénoncent une « biomascarade », soulignant les risques de pollutions et de nuisances et le lourd impact environnemental sur la forêt. Une fois la chaudière allumée, elle aurait besoin de 850.000 tonnes de bois par an. Une ressource qu’Uniper espère récolter à terme dans un rayon de 400 kilomètres autour de la centrale. Mais cette charge « industrielle » mettrait en danger l’équilibre de la forêt, selon les opposants. (...)
Le tribunal administratif a été saisi par un regroupement d’associations dont France nature environnement PACA (FNE PACA) ainsi que par les Parcs naturels régional du Luberon et du Verdon, et par des communes des Alpes-de-Haute-Provence. Tous affirmant que l’étude d’impact et l’enquête publique ont sous-estimé l’impact sur l’environnement de la centrale. Lors de l’audience du 27 avril, le rapporteur public a de même demandé l’annulation de l’autorisation préfectorale, au regard de l’insuffisance de l’étude d’impact. Largement sous-dimensionnée, l’étude d’impact n’a porté que sur un périmètre de 3 kilomètres autour de la centrale, ignorant l’ensemble de la zone d’approvisionnement. Jusqu’à présent, l’exploitant, suivi par les pouvoir publics, considérait que ces effets ne relevaient pas de sa responsabilité mais de celle des fournisseurs.
Les juges ont donc suivi l’analyse du rapporteur public. (...)
Me Mathieu Victoria, l’avocat des requérants, considère qu’il s’agit d’une « excellente décision » qui atteste « du point de vue du droit de la nécessité de prendre en compte les effets indirects ». Sophie Bourges de FNE PACA partage cette analyse : « C’est une avancée en de terme de jurisprudence qui pose des jalons pour une prise en compte des impacts indirects et de l’information du public sur un territoire approprié. »
Reste à savoir si Uniper fera appel de la décision. (...)