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La douleur des victimes donne-t-elle droit à un coupable ?
Article mis en ligne le 4 septembre 2019
dernière modification le 2 septembre 2019

Depuis le 5 juillet, date à laquelle Redouane Ikil a été condamné, en appel, à 18 ans de prison pour un braquage qu’il n’a pas commis, sa famille dénonce cette injustice. Dans une lettre publiée dans la presse en juillet dernier, sa sœur Amel Ikil exprimait la colère et le désarroi de la famille (1).

En réponse à cette lettre, les victimes des braquages et leurs conseils ont pris la parole dans la presse (2) pour exprimer la colère que suscite chez elles les prises de parole de la famille Ikil et du comité Justice pour Redouane Ikil (3). Nous republions ici la réponse du comité. (...)

"Que les victimes de ces braquages aient besoin d’exprimer publiquement leur ressenti est une chose tout à fait légitime. Ce qu’elles ont traversé est particulièrement terrible, notamment pour la caissière à Saint-Cyprien car ce n’est pas qu’elle qui a été personnellement touchée, ce sont aussi les membres de sa famille (son mari et ses enfants). Sa colère et sa peine, leur colère et leur peine sont tout à fait compréhensibles, cela Redouane Ikil l’a toujours exprimé, il a toujours exprimé sa tristesse face au traumatisme subi par ses anciennes collègues. Cela personne ne peut décemment le nier. Par contre, la douleur des victimes, si elle est prise en compte dans un procès d’assises, elle ne constitue pas une preuve, ni une garantie suffisante pour faire condamner un homme. Elle ne justifie pas que l’on produise un coupable à tout prix, au risque d’une erreur judiciaire.

Un procès d’assises consiste à prendre une décision d’une condamnation ou d’un acquittement sur la base de preuves irréfutables et ces preuves n’existent pas. Il ne suffit pas de dire qu’il y a des preuves pour qu’elles existent, il faut les produire, les montrer et convaincre de leur caractère irréfutable et cela n’a pas été fait Albi, quoi qu’en disent les victimes. (...)

On sait à quel point un procès d’assises est une expérience difficile pour les victimes. Toutefois, lorsque les soutiens de Redouane Ikil, lorsque la famille de Redouane Ikil s’expriment, il ne s’agit pas de se substituer aux victimes, les caissières sont les victimes premières de ces braquages. Mais Redouane Ikil injustement condamné pour des braquages qu’il n’a pas commis, injustement présenté comme coupable est une victime collatérale. Le besoin de justice des victimes ne justifie pas qu’on fasse d’un innocent un coupable à tout prix. Ensuite, dans cet article, le fait que Redouane Ikil ait pendant sa garde à vue demandé à voir son avocat est présenté comme une preuve de culpabilité. Là aussi ce sont des interprétations. Redouane Ikil, comme tout citoyen qui se retrouve en garde à vue, exerce son droit lorsqu’il demande à se faire assister d’un avocat. Le droit à se faire assister d’un avocat et le droit au silence sont des droits que tout un chacun peut exercer en garde à vue. Ce n’est pas une preuve de culpabilité. (...)