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Demain, l’Ecole
"L’ensauvagé, c’est celui qui croit à l’ensauvagement »
Par Claude Lelièvre - Vivement l’Ecole !
Article mis en ligne le 9 septembre 2020

A l’attention de Gérald Darmanin et de ceux qui lui prêtent attention : « En refusant l’humanité à ceux qui apparaissent comme les plus "sauvages" ou les plus "barbares" de ses représentants, on ne fait que leur emprunter une de leur attitude typique. Le barbare c’est celui qui croit à la barbarie ».

« On sait, en effet, que la notion d’humanité, englobant, sans distinction de race ou de civilisation, toutes les formes de l’espèce humaine, est d’apparition fort tardive et d’expansion limitée. Là même où elle semble avoir atteint son plus haut développement, il est nullement certain - l’histoire récente le prouve - qu’elle soit établie à l’abri des équivoques ou des régressions. Mais, pour de vastes fractions de l’espèce humaine et pendant des dizaines de millénaires, cette notion apparaît totalement absente. L’humanité cesse aux frontières de la tribu, du groupe linguistique, parfois même du village (...)

c’est dans la mesure même où l’on prétend établir une discrimination entre les cultures et les coutumes que l’on s’identifie le plus complètement avec celles qu’on essaye de nier c’est dans la mesure même où l’on prétend établir une discrimination entre les cultures et les coutumes que l’on s’identifie le plus complètement avec celles qu’on essaye de nier (Extrait de » Race et Histoire » (1961) de.Claude Lévy-Strauss)

Lire aussi :

L’« ensauvagement » est un mensonge, tout montre que la violence baisse
Gérald Darmanin, notre ministre de l’Intérieur, a récemment repris à son compte le concept d’« ensauvagement », contre lequel il prétend conduire sa politique pénale –vers plus de répression. Pourtant, depuis plusieurs décennies, les données publiques tendent, au contraire, à démontrer une baisse significative des violences en France. Il n’existe qu’un seul ensauvagement. Il réside dans les esprits de celles et ceux qui se laissent aveugler par l’émotion des faits divers, et refusent de regarder la réalité. (...)

Depuis plus de vingt ans, toutes les statistiques démontrent que les violences et le taux de criminalité sont plutôt en baisse. Cela est confirmé tant par les chiffres qui traduisent l’activité policière (venant du ministère de l’Intérieur), que par les enquêtes de victimation (réalisées par l’INSEE auprès de la population, que des plaintes aient été déposées ou non).

Le nombre d’homicides a baissé de moitié, passant de 1.800 en 1996 à 845 en 2018. Même tendance à la baisse pour les vols, avec ou sans arme. Côté enquêtes de victimation, les chiffres –sur lesquels on peut le plus raisonnablement s’appuyer selon l’Observatoire scientifique du crime et de la justice (OSCJ)– ne montrent pas non plus de tendance à la hausse. Les vols avec violences, les braquages, les cambriolages, les vols de véhicules sont tous à la baisse de manière constante, sur les trois dernières années.

Toutes les sources convergent vers une même réalité : les violences sont à la baisse depuis une vingtaine d’années.

S’il existe bien, ces toutes dernières années, une faible augmentation du nombre des violences non crapuleuses déclarées, constatée tant par les chiffres de la police que de l’INSEE, elle est expliquée essentiellement par une augmentation des déclarations de violences conjugales, sexuelles et intrafamiliales –favorisées par le phénomène #MeToo. Ce reflet d’une triste réalité percée à jour, qui préexistait, ne traduit pas pour autant d’explosion particulière des violences dans leur ensemble.

On pourra toujours discuter les variations de méthode et les inexactitudes propres à toute statistique. Toutes les sources et toutes les méthodes convergent vers une même réalité : les violences sont plutôt à la baisse en France depuis une vingtaine d’années et rien n’indique qu’il y aurait une explosion des violences dans le temps.

Le sentiment d’insécurité, conséquence d’un effet de loupe (...)

. Il est notamment la conséquence de certains médias et des réseaux sociaux, devenus amplificateurs artificiels d’une violence en réalité en baisse. Ce sentiment d’insécurité irrationnel, illusoire, fantasmé est en réalité entretenu par ceux dont la peur est le fond de commerce. (...)

Un ensauvagement de la pensée bien réel

En 1962, Claude Levi-Strauss publiait un ouvrage intitulé La pensée sauvage. Dans cet essai, il distinguait la pensée « domestiquée » de la pensée « sauvage ». (...)

Les personnes qui dénoncent un « ensauvagement » de la société, en contradiction avec la réalité, reflètent l’ensauvagement de la pensée. Une pensée non rationnelle, incapable de prendre un recul indispensable et d’envisager le réel au-delà du spectacle médiatique. Une pensée qui s’abandonne à la haine et qui s’en remet aux passions tristes pour écrire la loi. (...)

La vraie menace, c’est cette pensée de plus en plus sauvage, dans une société qui tend, au contraire, à s’apaiser.