Bandeau
mcInform@ctions
Travail de fourmi, effet papillon...
Descriptif du site
ccfd
"L’agriculture intelligente", alibi de l’agro-industrie
Article préparé et signé par Agronomes et Vétérinaires sans frontières, Action contre la Faim, le CCFD-Terre Solidaire, Care, France Nature Environnement, Gevalor, Oxfam France, le Secours catholique, Peuples Solidaires, WCEF, au sein du Réseau Action Climat
Article mis en ligne le 18 septembre 2015
dernière modification le 11 septembre 2015

En 2014, des États (dont la France), acteurs non gouvernementaux et organisations internationales se sont réunis au sein d’une « Alliance mondiale pour l’agriculture intelligente face au climat » (Global Alliance for Climate-Smart Agriculture - GACSA). Cette alliance propose pourtant des réponses totalement inadaptées au défis climatiques et alimentaires.

L’objectif affiché de « l’Alliance mondiale pour l’agriculture intelligente face au climat » ? créer un environnement scientifique, politique et économique favorable au développement d’une agriculture qui « augmente la productivité et la résilience (adaptation) des cultures de manière durable, favorise la réduction/élimination des gaz à effet de serre (atténuation), améliore la sécurité alimentaire nationale et contribue à la réalisation des objectifs de développement du pays ».

Le concept de « climate-smart agriculture », sur lequel s’est construit l’Alliance mondiale (mais également des alliances régionales), est notamment porté par les grands acteurs privés de l’agro-industrie, ainsi que par les pays présentant un secteur agro-industriel important.

Les acteurs de ce secteur y voient une opportunité d’autopromotion et de développement de nouveaux marchés (par exemple pour les biotechnologies et la pétrochimie) et de nouvelles sources de revenus (par exemple via la valorisation sur le marché du potentiel de séquestration du carbone lié aux cultures de rente dans lesquels ils sont spécialisés). (...)

La « climate-smart agriculture » sert d’alibi aux décideurs pour ne pas s’engager dans la transformation profonde des modèles de développement agricole et des systèmes alimentaires.

C’est pourtant ce que requièrent la lutte contre l’insécurité alimentaire et contre les changements climatiques, au Nord comme au Sud.

Cette Alliance passe à côté de l’objectif prioritaire de renforcement des agricultures familiales paysannes : celles où le travail et le capital restent principalement familiaux, celles qui entretiennent un lien très fort avec les territoires, celles qui peuvent porter une approche agroécologique, pour une bonne gestion des ressources naturelles locales. Ce sont les seules à mêmes de répondre véritablement au défi climatique et alimentaire et aux objectifs de lutte contre la pauvreté.

En légitimant un modèle agro-industriel à grande échelle, la « climate-smart agriculture » et son Alliance proposent une réponse inadaptée au double défi climatique et alimentaire. (...)

Les systèmes d’agriculture intensive en intrants chimiques et en énergies fossiles sont les principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole. (...)

L’institutionnalisation de ce concept de « climate-smart agriculture » au travers de la création de l’Alliance mondiale est particulièrement inquiétante.

D’une part, parce qu’il n’y a pas de mécanisme de suivi-évaluation et de cadre de redevabilité, ni pour les acteurs engagés, ni pour les projets qui seront valorisés comme « climate-smart ».

D’autre part, parce qu’il n’y a aucun critère social ou environnemental permettant de garantir l’intérêt de ces projets.

Enfin, il y a un risque majeur de créer un espace politique concurrentiel aux négociations en cours à l’Onu, qui défendrait les positions de quelques-uns ou s’érigerait en « prescripteur », orientant largement les politiques internationales. Ni le concept de « climate-smart agriculture », ni son Alliance, ne devraient être inscrits à l’Agenda des solutions porté par la présidence française de la COP21, ou dans l’accord international qui sera adopté à Paris. (...)