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L’adieu aux larmes
la courte vie d’un soldat en Afghanistan par Gabriel lundi 26 août 2013
Article mis en ligne le 31 août 2013
dernière modification le 26 août 2013

J’ai posé mon fusil la crosse dans le sable et je me suis adossé à un rocher laissant la brulure de la pierre envahir mon corps. Devant mes yeux irrités par le vent du désert, il n’y a que sable, cailloux, gorges et montagnes à perte de vue. Dans ces magnifiques paysages tourmentés d’Afghanistan, on s’attend à chaque instant voir surgir des djinns de nulle part. Ma gourde est presque vide et le soleil encore à son zénith. Nous nous sommes fait piéger dans cette zone de misère. Sous le feu nourrit des Talibans, trois de mes camarades sont tombés le nez dans la poussière. Si Molière nous voyait, il nous dirait certainement : « Mais que diable êtes vous allez faire dans cette galère ? »

J’étais un soldat volontaire. Je dis bien j’étais car, croyant apporter à ce pays liberté, paix et justice, toutes ces valeurs démocratiques dont on nous bassine les vertus à longueur de discours médiatiques, je me suis aperçu que dans cette contrée, nous n’étions pas les bienvenus. Mes certitudes vacillent et mon obéissance face à la hiérarchie, représentée ici même par un excité de capitaine, en a pris un sérieux coup. Nous faisons une guerre dont l’idéologie repose sur les résultats économiques calculés par une poignée de conseillés financiers dont les postérieurs sont bien calés dans des fauteuils en cuir à l’abri des balles qui sifflent à nos oreilles. Je les imagine déjà l’air contrit dans leurs bureaux climatisés passer ma section en perte et profit sur leurs feuilles de calcul Excel.

C’est dans les yeux des femmes et des enfants que j’ai découvert l’ingérence dont nous nous rendons coupable. Ils ne nous perçoivent pas comme des libérateurs mais comme des envahisseurs. Non que leurs arriérés de Talibans soient un choix désirable pour eux mais, ils avaient tant espéré en nous que la haine qu’ils nous vouent est à la hauteur de leur désespoir et de notre trahison.

Les moustiques d’aciers se multiplient et, tout autour de nous volent des éclats de roche. (...)