
Dans la journée de vendredi, plusieurs directions régionales du Ministère du Travail (Direccte) ont été occupées en France par un mouvement unitaire (CIP, CGT, Sud…) d’intermittents, de chômeurs et de précaires opposés à la nouvelle convention Unedic. Reportage à Aubervilliers.
Il est 8h30, les premiers voyageurs s’acheminent vers le parvis de la Gare de l’Est encore épargné par le tumulte. Le lieu du rassemblement a été tenu secret jusqu’à la veille, pour détourner l’attention des agents des renseignements généraux (RG) et assurer le succès de l’action coup de poing qui se fomente. Les dernières cigarettes se consument et le soleil commence à embraser les lieux. Plusieurs petits groupes éparses, constitués de précaires et d’intermittents, s’engouffrent frénétiquement dans le métro. Boris, notre référant, nous adresse un signe discret et net qui ordonne d’accélérer la cadence. « Il n’y a pas de droit du travail sans droit au chômage, le chômage n’est pas l’inverse du travail mais un des moments du travail qui doit être rémunéré. C’est le modèle allemand du plein emploi précaire qui se profile, chacun est renvoyé à soi même dans la lutte pour l’emploi : le chômage est devenu le laboratoire de l’individualisation du rapport salarial » explique-t-il de manière saccadée, à peine embarqué dans le wagon, dans un mélange d’entrain et de consternation. A quelques pas de là, ses complices débattent du contenu d’un tract prêt à être diffusé.
9h30. Plusieurs poignées de précaires s’échappent de la bouche du métro et atterrissent devant la Poste de la Porte de la Chapelle, déjà investie par les usagers. (...)
« Vous défendez le travail ? Nous aussi ! »... les mots d’ordre fusent et contrebalancent la campagne de désinformation orchestrée par le patronat sur ce sujet brûlant. « Bon courage ! » lâche une secrétaire croisée dans l’ascenseur. Rapidement, les militants épuisent leurs stocks de tracts et font chauffer les imprimantes pour se réapprovisionner. Des syndicalistes de la CGT Spectacle échangent avec le responsable de l’Unité territoriale de Paris qui affiche une moue dubitative. Des intermittents interrompent une réunion de travail de cadres tirés à quatre épingles et hagards. Les salariés les plus proches du terrain leur réservent un accueil favorable. (...)