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Le Monde
Immigration : le mythe de « l’appel d’air »
#immigration #extremedroite
Article mis en ligne le 12 janvier 2023

Les migrants choisiraient leur pays d’arrivée en fonction de la qualité des prestations sociales, selon le concept d’« appel d’air ». Rien de plus faux, expliquent les chercheurs. Durcir la politique migratoire fixerait même les exilés sur leur terre d’accueil.

Histoire d’une notion.

Avant même que le projet du gouvernement sur l’immigration soit connu, la droite et l’extrême droite ont entonné un refrain qui accompagne, depuis vingt ans, toutes les controverses sur les flux migratoires : si la France améliore ses conditions d’accueil, elle créera un redoutable « appel d’air ». La présence de centres d’hébergement, l’accès aux allocations, la prise en charge des soins médicaux ou la promesse de régularisations encouragent, selon elles, les migrants à rejoindre la France : ces politiques généreuses « aspireraient la misère du monde », résume, en 2019, le philosophe Jérôme Lèbre dans la revue Lignes. (...)

Repris ces dernières semaines par Eric Ciotti (Les Républicains, LR) ou Jordan Bardella (Rassemblement national, RN), ce « discours connu de la mythologie d’extrême droite », selon Jérôme Lèbre, s’est imposé dans le débat, y compris à gauche, au début des années 2000, lors des polémiques sur le camp de Sangatte (Pas-de-Calais). Il repose sur l’idée que les migrants se comportent comme les sujets rationnels et éclairés de la théorie libérale classique (...)

Si cette logique semble inspirée par le bon sens, elle ne correspond nullement à la réalité, et surtout à la complexité, des parcours migratoires. L’appel d’air est un « mythe », constate, en 2021, l’Institut Convergences Migrations, qui rassemble six cents chercheurs en sciences sociales issus de plusieurs institutions : il n’est en rien « corroboré par les travaux de recherche ». Les études internationales consacrées aux déterminants de la migration montrent en effet qu’il n’existe, selon l’institut, « aucune corrélation » entre la qualité des politiques d’accueil et l’orientation des flux migratoires. (...)

Les facteurs dits « push » – les troubles politiques, économiques, sociaux ou religieux qui incitent les migrants à quitter leur pays – sont en effet nettement plus puissants que les facteurs dits « pull » – l’attractivité, réelle ou fantasmée, des pays de destination. « Les études montrent que ce sont beaucoup moins les conditions d’arrivée (souvent mauvaises) qui attirent [que] la situation dans les pays de départ, où se mêlent l’absence d’espoir, le chômage massif des jeunes et parfois aussi la guerre et l’insécurité [qui poussent à partir] », analyse l’Institut Convergences Migrations. (...)