
Chantal Jouanno observe « un retour en force des stéréotypes » ces dernières années - dans les tenues, la presse pour fillettes - « qui cantonnent les petites filles à un rôle basé sur l’apparence ». Les conséquences de cette hypersexualisation dépassent le cadre de « l’intérêt supérieur de l’enfant », soulignent d’une même voix la sénatrice et la ministre : « Comment lutter pour l’égalité entre hommes et femmes dans la société quand, dès l’enfance, nous construisons une image en fonction des codes de la séduction ? », interroge Roselyne Bachelot. L’intitulé du rapport rappelle ce lien essentiel. Son titre : « Contre l’hypersexualisation, un nouveau combat pour l’égalité ».
Si le constat est lourd d’implications, les réponses préconisées restent toutefois mesurées. D’abord parce que le phénomène renvoie à la question de la norme. Et « il est impossible pour le législateur d’établir ce qu’est une norme convenable », relève Chantal Jouanno.
La proposition la plus marquante de ce rapport, et que soutient la ministre, c’est l’interdiction des concours de ’mini miss’ de moins de 16 ans. Une mesure en prise directe avec l’actualité : alors que ces événements se développent en France, un tribunal vient de donner raison au Planning Familial qui avait obtenu l’interdiction d’un concours de ’mini miss’ à Auch.
Reste que la mise en œuvre législative d’une telle mesure prendra du temps ; elle n’a aucune chance de voir le jour sous cette législature. A noter par ailleurs qu’une proposition de loi vient d’être déposée à l’Assemblée nationale par l’UMP Henriette Martinez ; elle vise à interdire l’organisation de concours de beauté pour les enfants de moins de 11 ans. (...)
Une autre mesure proposée par la sénatrice et soutenue par la ministre vise à responsabiliser les acteurs économiques. Car la sexualisation des fillettes constitue un nouveau marché, elle est « directement liée aux pressions de l’économie de la consommation », note le rapport.
Mais pas question pour autant de mettre trop de pression sur ces acteurs économiques- du prêt à porter, des cosmétiques ou de la publicité. (...)
Sur le même sujet, quelques jours plus tôt, Roselyne Bachelot avait lancé une autre charte face à ce phénomène : celle-là vise à responsabiliser les médias.
Et qu’en est-il des publicitaires ? Certains pays (le Québec, la Norvège ou la Suède) vont jusqu’à interdire la publicité pour les enfants de moins de 13 ans, rappelle le CAS. Chantal Jouanno n’oublie pas qu’elle y était favorable lors des discussions du Grenelle de l’Environnement. Mais elle ne l’est plus aujourd’hui
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Troisième grand axe : la mise en place d’un système de signalement des abus observés dans le secteur marchand ou médiatique. Les parents pourraient lancer l’alerte via un site internet public - encore à mettre en oeuvre. Un tel système, le site ParentPort, existe déjà en Grande-Bretagne.
Au-delà, la sénatrice et la ministre plaident pour renforcer les initiatives d’éducation. Notamment la nécessité d’une éducation à l’image dès la 6ème – elle commence aujourd’hui en 3ème. Faire porter les efforts sur l’éducation, c’était aussi l’une des principales pistes recommandées par les auteurs du rapport sur la sexualité des adolescents, remis à Jeannette Bougrab le 16 février. Ils y dénonçaient une « nouvelle soumission des humains aux normes de la marchandisation et aux rapports de sexe inégalitaires ».