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Europacity : le débat public se conclut sur des positions inconciliables
Article mis en ligne le 21 juillet 2016
dernière modification le 15 juillet 2016

Pendant quatre mois, plus de 2.000 personnes ont participé aux discussions sur le projet pharaonique d’Europacity à Gonesse, dans le Val-d’Oise. Porté par le groupe Auchan, ce complexe de commerces et de loisirs conduirait à la perte de terres cultivées de grande qualité pour une création d’emplois discutée.

Cinq réunions publiques, neuf ateliers, trois conférences-débats, un bus dédié, un forum internet... pour discuter du mégaprojet d’Europacity, la Commission nationale du débat public (CNDP) n’a pas lésiné sur les moyens. Depuis le 15 mars, plus de 2.000 personnes ont ainsi participé aux assemblées organisées dans le Val-d’Oise et en Seine-Saint-Denis. Au cœur des débats, le pharaonique complexe à 3,1 milliards d’euros, porté par le groupe Auchan, mêlant commerces, loisirs et culture, prévu en 2024 à Gonesse (Val-d’Oise). « La Commission a fait le maximum pour qu’il y ait des échanges voulus », observe Alain Boulanger, qui a assisté à la plupart des réunions.

Pourtant, cet opposant historique au projet, membre du Collectif pour le Triangle de Gonesse (CPGT), dénonce un faux débat : « C’était un double monologue, pas un dialogue. » Un sentiment partagé — quoique nuancé — par la présidente la Commission particulière. Dans ses conclusions, présentées au public le 4 juillet dernier, Claude Brévan a ainsi noté des « points de vue inconciliables », notamment quant à la délicate question de l’opportunité du projet.
« Le travail n’a peut-être pas été totalement inutile »

Car si le débat public devait avant tout s’interroger sur la pertinence d’Europacity, les opposants ne sont pas parvenus à faire table rase du mégacomplexe. « On nous a sans cesse caricaturés comme des écolos antitout, hors du temps, alors comment discuter ? » se demande Alain Boulanger. Claude Brévan se veut pourtant optimiste : « Oui, ce débat a souvent semblé piétiner. Mais en réalité, on voit une progression, même si les partisans ne sont pas devenus des opposants et vice versa. On a vu apparaître des “oui, mais...”, des nuances dans les affirmations des uns et des autres. »

La présidente espère ainsi que « le travail n’a peut-être pas été totalement inutile ». C’est également l’avis de Christophe Dalstein, le directeur d’Alliages et Territoires (la filiale d’Auchan porteuse du projet), qui salue, dans un communiqué, « un temps d’échange riche et particulièrement dense, un grand moment de démocratie locale ». Même Alain Boulanger reconnaît l’utilité du débat pour « bousculer les certitudes ». « Ce n’est pas le doute qui rend fou, ce sont les certitudes, philosophe-t-il. Après ces quatre mois de réunion, tout un chacun doit être ébranlé dans ses convictions. » (...)

Mais peut-on encore stopper le « paquebot » ? Dans sa contribution au débat public, l’eurodéputé écologiste Pascal Durand se montre pessimiste : « Rien ne semble arrêter cet instinct de mort et de destruction du vivant. Ni la qualité du sol, pourtant exceptionnelle, ni la présence de paysans, ni le respect de l’environnement ou les objectifs de limitation des gaz à effet de serre, ni la sauvegarde des emplois locaux, ni le maintien d’un cadre de vie en harmonie avec le vivant. » Et il conclut : « Ces “psychopathes de la croissance”, selon la formule de Fabrice Nicolino, ne conçoivent la société que comme ça : des parkings à la place de fermes urbaines, des échangeurs, du béton, du bitume et, pour horizon, une piste de ski sur une montagne en kit. »