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Libération
En Tunisie, victoire judiciaire pour la militante queer Rania Amdouni
Article mis en ligne le 21 mars 2021

C’est une sacrée victoire pour Rania Amdouni, et un message d’espoir pour ses congénères.

La militante queer a remporté son procès en appel, et échappe ainsi à six mois d’emprisonnement. Elle était jusqu’à présent incarcérée dans la prison pour femmes de la Manouba, à l’ouest de Tunis, pour outrage aux forces de l’ordre et troubles.

Symbole des revendications de la jeunesse

Rania Amdouni est de toutes les manifestations : tour à tour déguisée en clown, enroulée dans un drapeau LGBT +, au premier rang des cortèges, son visage est devenu celui de la jeunesse tunisienne, celle qui se bat pour ses droits. Elle fait partie de l’association Damj, première organisation de soutien aux personnes LGBT +, et préside Chouf, structure féministe œuvrant pour les droits des personnes s’identifiant comme femmes. Ses apparitions provoquent l’ire des autorités, depuis les photos prises le 30 janvier, la montrant debout face à des policiers, dissimulés par des boucliers. (...)

Harcelée depuis plusieurs mois par les forces de l’ordre, en ligne ou dans la rue, Rania Amdouni finit par se rendre à un poste de police, afin de porter plainte. Non seulement, les agents présents refusent, mais ils se moquent d’elle. Hors du commissariat, la jeune femme crie, pour protester. Elle est arrêtée, et condamnée le 4 mars, pour avoir insulté un officier de police. (...)

Depuis 2011, et le vent de liberté qui a soufflé sur la Tunisie, le ton a évolué. « Aujourd’hui, la cause LGBTQI + est devenue un vrai sujet de discussion, alors qu’avant la Révolution, c’était un immense tabou », poursuit Guellali. Surtout, à l’image des luttes intersectionnelles occidentales, la cause s’est pleinement intégrée à d’autres motifs de révoltes. Les associations rejoignent des coalitions, luttent pour les libertés individuelles. « Les jeunes veulent des changements institutionnels, juridiques, et plus largement, prônent une nouvelle vision de la société. » Rania Amdouni est de ceux-là.
« Les gens sont en colère »

En janvier, éclatent des manifestations contre la classe politique et la répression policière, sur fond de remaniement électoral. La jeunesse afflue, massivement, dans les rues. (...)

L’article 230 du code pénal, qui prévoit jusqu’à trois ans d’emprisonnement pour un rapport sexuel « sodomite », est toujours en vigueur. « La communauté LGBT est doublement victime : de toutes les formes d’abus que connaissent les Tunisiens, mais aussi de la cristallisation du discours de haine et d’intolérance autour d’eux », renchérit Amna Guellali, qui accuse le gouvernement de « dérive liberticide ». Et les personnes LGBT +, Rania Amdouni en tête, incarnent ce que les autorités tunisiennes souhaitent mettre au pas : la liberté, la jeunesse. (...)

Ali Bousselmi précise néanmoins : « Nous avons remporté une victoire mais pas la guerre. »